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Les Trois Mousquetaires / Три мушкетера. Александр ДюмаЧитать онлайн книгу.

Les Trois Mousquetaires / Три мушкетера - Александр Дюма


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C’est lui, s’écria Bonacieux.

      – Qui lui ? demanda le cardinal.

      – Celui qui m’a enlevé ma femme. »

      Le cardinal sonna une seconde fois. L’officier reparut.

      « Remettez cet homme aux mains de ses deux gardes, et qu’il attende que je le rappelle devant moi.

      – Non, Monseigneur ! non, ce n’est pas lui ! s’écria Bonacieux ; non, je m’étais trompé : c’est un autre qui ne lui ressemble pas du tout ! Monsieur est un honnête homme.

      – Emmenez cet imbécile ! » dit le cardinal.

      L’officier prit Bonacieux sous le bras, et le reconduisit dans l’antichambre où il trouva ses deux gardes.

      Le nouveau personnage qu’on venait d’introduire suivit des yeux avec impatience Bonacieux jusqu’à ce qu’il fût sorti, et dès que la porte se fut refermée sur lui :

      « Ils se sont vus, dit-il en s’approchant vivement du cardinal.

      – Qui ? demanda Son Éminence.

      – Elle et lui.

      – La reine et le duc ? s’écria Richelieu.

      – Oui.

      – Et où cela ?

      – Au Louvre.

      – Vous en êtes sûr ?

      – Parfaitement sûr.

      – Qui vous l’a dit ?

      – Mme de Lannoy, qui est toute à Votre Éminence, comme vous le savez.

      – Pourquoi ne l’a-t-elle pas dit plus tôt ?

      – Soit hasard, soit défiance, la reine a fait coucher Mme de Fargis dans sa chambre, et l’a gardée toute la journée.

      – C’est bien, nous sommes battus. Tâchons de prendre notre revanche.

      – Je vous y aiderai de toute mon âme, Monseigneur, soyez tranquille.

      – Comment cela s’est-il passé ?

      – À minuit et demi, la reine était avec ses femmes…

      – Où cela ?

      – Dans sa chambre à coucher…

      – Bien.

      – Lorsqu’on est venu lui remettre un mouchoir de la part de sa dame de lingerie…

      – Après ?

      – Aussitôt la reine a manifesté une grande émotion, et, malgré le rouge dont elle avait le visage couvert, elle a pâli.

      – Après ! après !

      – Cependant, elle s’est levée, et d’une voix altérée : « Mesdames, a-t-elle dit, attendez-moi dix minutes, puis je reviens. » Et elle a ouvert la porte de son alcôve, puis elle est sortie.

      – Pourquoi Mme de Lannoy n’est-elle pas venue vous prévenir à l’instant même ?

      – Rien n’était bien certain encore ; d’ailleurs, la reine avait dit : « Mesdames, attendez-moi » ; et elle n’osait désobéir à la reine.

      – Et combien de temps la reine est-elle restée hors de la chambre ?

      – Trois quarts d’heure.

      – Aucune de ses femmes ne l’accompagnait ?

      – Doña Estefania seulement.

      – Et elle est rentrée ensuite ?

      – Oui, mais pour prendre un petit coffret de bois de rose à son chiffre, et sortir aussitôt.

      – Et quand elle est rentrée, plus tard, a-t-elle rapporté le coffret ?

      – Non.

      – Mme de Lannoy savait-elle ce qu’il y avait dans ce coffret ?

      – Oui : les ferrets en diamants que Sa Majesté a donnés à la reine.

      – Et elle est rentrée sans ce coffret ?

      – Oui.

      – L’opinion de Mme de Lannoy est qu’elle les a remis alors à Buckingham ?

      – Elle en est sûre.

      – Comment cela ?

      – Pendant la journée, Mme de Lannoy, en sa qualité de dame d’atour de la reine, a cherché ce coffret, a paru inquiète de ne pas le trouver et a fini par en demander des nouvelles à la reine.

      – Et alors, la reine… ?

      – La reine est devenue fort rouge et a répondu qu’ayant brisé la veille un de ses ferrets, elle l’avait envoyé raccommoder chez son orfèvre.

      – Il faut y passer et s’assurer si la chose est vraie ou non.

      – J’y suis passé.

      – Eh bien, l’orfèvre ?

      – L’orfèvre n’a entendu parler de rien.

      – Bien ! bien ! Rochefort, tout n’est pas perdu, et peut-être… peut-être tout est-il pour le mieux !

      – Le fait est que je ne doute pas que le génie de Votre Éminence…

      – Ne répare les bêtises de mon agent, n’est-ce pas ?

      – C’est justement ce que j’allais dire, si Votre Éminence m’avait laissé achever ma phrase.

      – Maintenant, savez-vous où se cachaient la duchesse de Chevreuse et le duc de Buckingham ?

      – Non, Monseigneur, mes gens n’ont pu rien me dire de positif là-dessus.

      – Je le sais, moi.

      – Vous, Monseigneur ?

      – Oui, ou du moins je m’en doute. Ils se tenaient, l’un rue de Vaugirard, n° 25, et l’autre rue de La Harpe, n° 75.

      – Votre Éminence veut-elle que je les fasse arrêter tous deux ?

      – Il sera trop tard, ils seront partis.

      – N’importe, on peut s’en assurer.

      – Prenez dix hommes de mes gardes, et fouillez les deux maisons.

      – J’y vais, Monseigneur. »

      Et Rochefort s’élança hors de l’appartement.

      Le cardinal, resté seul, réfléchit un instant et sonna une troisième fois.

      Le même officier reparut.

      « Faites entrer le prisonnier », dit le cardinal.

      Maître Bonacieux fut introduit de nouveau, et, sur un signe du cardinal, l’officier se retira.

      « Vous m’avez trompé, dit sévèrement le cardinal.

      – Moi, s’écria Bonacieux, moi, tromper Votre Éminence !

      – Votre femme, en allant rue de Vaugirard et rue de La Harpe, n’allait pas chez des marchands de toile.

      – Et où allait-elle, juste Dieu ?

      – Elle allait chez la duchesse de Chevreuse et chez le duc de Buckingham.

      – Oui, dit Bonacieux rappelant tous ses souvenirs ; oui, c’est cela, Votre Éminence a raison. J’ai dit plusieurs fois à ma femme qu’il était étonnant que des marchands de toile demeurassent dans des maisons pareilles, dans des maisons qui n’avaient pas d’enseignes, et chaque fois ma femme s’est mise à rire. Ah ! Monseigneur, continua Bonacieux en se jetant aux pieds de l’Éminence, ah ! que vous êtes bien le cardinal, le grand cardinal, l’homme de génie que tout le monde révère. »

      Le cardinal, tout médiocre qu’était le triomphe remporté sur un être aussi vulgaire que l’était Bonacieux, n’en jouit pas moins


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