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Aphorismes sur la sagesse dans la vie. Arthur SchopenhauerЧитать онлайн книгу.

Aphorismes sur la sagesse dans la vie - Arthur Schopenhauer


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éclairée, chaude, gaie, au milieu des neiges et des glaces d'une nuit de décembre. Par conséquent, avoir une individualité riche et supérieure et surtout beaucoup d'intelligence constitue indubitablement sur terre le sort le plus heureux, quelque différent qu'il puisse être du sort le plus brillant. Aussi que de sagesse dans cette opinion émise sur Descartes par la reine Christine de Suède, âgée alors de dix-neuf ans à peine: «M. Descartes est le plus heureux de tous les mortels, et sa condition me semble digne d'envie» (Vie de Desc., par Baillet, l. VII, ch. 10). Descartes vivait à cette époque depuis vingt ans en Hollande, dans la plus profonde solitude, et la reine ne le connaissait que par ce qu'on lui en avait raconté et pour avoir lu un seul de ses ouvrages. Il faut seulement, et c'était précisément le cas chez Descartes, que les circonstances extérieures soient assez favorables pour permettre de se posséder et d'être content de soi-même; c'est pourquoi l'Ecclésiaste (7, 12) disait déjà: «La sagesse est bonne avec un patrimoine et nous aide à nous réjouir de la vue du soleil.»

      L'homme à qui, par une faveur de la nature et du destin, ce sort a été accordé, veillera avec un soin jaloux à ce que la source intérieure de son bonheur lui demeure toujours accessible; il faut pour cela indépendance et loisirs. Il les acquerra donc volontiers par la modération et l'épargne; et d'autant plus facilement qu'il n'en est pas réduit, comme les autres hommes, aux sources extérieures des jouissances. C'est pourquoi la perspective des fonctions, de l'or, de la faveur, et l'approbation du monde ne l'induiront pas à renoncer à lui-même pour s'accommoder aux vues mesquines ou au mauvais goût des hommes. Le cas échéant, il fera comme Horace dans son épître à Mécène (livre I, ép. 7). C'est une grande folie que de perdre à l'intérieur pour gagner à l'extérieur, en d'autres termes, de livrer, en totalité ou en partie, son repos, son loisir et son indépendance contre l'éclat, le sang, la pompe, les titres et les honneurs. Gœthe l'a fait cependant. Quant à moi, mon génie m'a entraîné énergiquement dans la voie opposée.

      Cette vérité, examinée ici, que la source principale du bonheur humain vient de l'intérieur, se trouve confirmée par la juste remarque d'Aristote dans sa Morale à Nicomaque (I, 7; et VII, 13, 14); il dit que toute jouissance suppose une activité, par conséquent l'emploi d'une force, et ne peut exister sans elle. Cette doctrine aristotélicienne de faire consister le bonheur de l'homme dans le libre exercice de ses facultés saillantes est reproduite également par Stobée dans son Exposé de la morale péripatéticienne (Ecl. éth. II, ch. 7); en voici un passage: Ενεργειαν ειναι την ευδαιμονιαν χατ' αρετην, εν πραξεσι προηγουμεναις χατ' ευχην (Le bonheur consiste à exercer ses facultés par des travaux capables de résultat); il explique aussi que αρετη désigne toute faculté hors ligne. Or la destination primitive des forces dont la nature a muni l'homme, c'est la lutte contre la nécessité qui l'opprime de toutes parts. Quand la lutte fait trêve un moment, les forces sans emploi deviennent un fardeau pour lui; il doit alors jouer avec elles, c'est-à-dire les employer sans but; sinon il s'expose à l'autre source des malheurs humains, à l'ennui. Aussi est-ce l'ennui qui torture les grands et les riches avant tous autres, et Lucrèce a fait de leur misère un tableau dont on a chaque jour, dans les grandes villes, l'occasion de reconnaître la frappante vérité:

      Exit sæpe foras magnis ex ædibus ille,

       Esse domi quem pertæsum est, subitaque reventat;

       Quippe foris nihilo melius qui sentiat esse

       Currit, agens mannos, ad villam præcipitanter,

       Auxilium tectis quasi ferre ardentibus instans:

       Oscitat exemplo, tetigit quum limina villæ;

       Aut abit in somnum gravis, atque oblivia quærit;

       Aut etiam properana urbem petit, atque revisit.

      (L. III, v. 1073 et suiv.).

      (Celui-ci quitte son riche palais pour se dérober à l'ennui; mais il y rentre un moment après, ne se trouvant pas plus heureux ailleurs. Cet autre se sauve à toute bride dans ses terres, on dirait qu'il court éteindre un incendie; mais, à peine en a-t-il touché les limites, qu'il y trouve l'ennui; il succombe au sommeil et cherche à s'oublier lui-même: dans un moment, vous allez le voir regagner la ville avec la même promptitude.) (Traduction de La Grange, 1821.)

      Chez ces messieurs, tant qu'ils sont jeunes, les forces musculaires et génitales doivent faire les frais. Mais plus tard il ne reste plus que les forces intellectuelles; en leur absence ou à défaut de développement ou de matériaux approvisionnés pour servir leur activité, la misère est grande. La volonté étant la seule force inépuisable, on cherche alors à la stimuler en excitant les passions; on recourt, par exemple, aux gros jeux de hasard, à ce vice dégradant en vérité.—Du reste, tout individu désœuvré choisira, selon la nature des forces prédominantes en lui, un amusement qui les occupe, tel que le jeu de boule ou d'échecs, la chasse ou la peinture, les courses de chevaux ou la musique, les jeux de cartes ou la poésie, l'héraldique ou la philosophie, etc.

      Nous pouvons même traiter cette matière avec méthode, en nous reportant à la racine des trois forces physiologiques fondamentales: nous avons donc à les étudier ici dans leur jeu sans but; elles se présentent alors à nous comme la source de trois espèces de jouissances possibles, parmi lesquelles chaque homme choisira celles, qui lui sont proportionnées selon que l'une ou l'autre de ces forces prédomine en lui.

      Ainsi nous trouvons, premièrement, les jouissances de la force reproductive: elles consistent dans le manger, le boire, la digestion, le repos et le sommeil. Il existe des peuples entiers à qui l'on attribue de faire glorieusement de ces jouissances des plaisirs nationaux. Secondement, les jouissances de l'irritabilité: ce sont les voyages, la lutte, le saut, la danse, l'escrime, l'équitation et les jeux athlétiques de toute espèce, comme aussi la chasse, voire même les combats et la guerre. Troisièmement, les jouissances de la sensibilité: telles que contempler, penser, sentir, faire de la poésie, de l'art plastique, de la musique, étudier, lire, méditer, inventer, philosopher, etc. Il y aurait à faire bien des observations sur la valeur, le degré et la durée de ces différentes espèces de jouissances; nous en abandonnons le soin au lecteur. Mais tout le monde comprendra que notre plaisir, motivé constamment par l'emploi de nos forces propres, comme aussi notre bonheur, résultat du retour fréquent de ce plaisir, seront d'autant plus grands que la force productrice est de plus noble espèce. Personne ne pourra nier non plus que le premier rang, sous ce rapport, revient à la sensibilité, dont la prédominance décidée établit la distinction entre l'homme et les autres espèces animales; les deux autres forces physiologiques fondamentales, qui existent dans l'animal au même degré ou à un degré plus énergique même que chez l'homme, ne viennent qu'en seconde ligne. À la sensibilité appartiennent nos forces intellectuelles. C'est pourquoi sa prédominance nous rend aptes à goûter les jouissances qui résident dans l'entendement, ce qu'on appelle les plaisirs de l'esprit; ces plaisirs sont d'autant plus grands que la prédominance est plus accentuée[2]. L'homme normal, l'homme ordinaire ne peut prendre un vif intérêt à une chose que si elle excite sa volonté, donc si elle lui offre un intérêt personnel. Or toute excitation persistante de la volonté est, pour le moins, d'une nature mixte, par conséquent combinée avec de la-douleur. Les jeux de cartes, cette occupation habituelle de la «bonne société» dans tous les pays[3], sont un moyen d'exciter intentionnellement la volonté, et cela par des intérêts tellement minimes qu'ils ne peuvent occasionner que des douleurs momentanées et légères, non pas de ces douleurs permanentes et sérieuses; tellement qu'on peut les considérer comme de simples chatouillements de la volonté. L'homme doué des forces intellectuelles prédominantes, au contraire, est capable de s'intéresser vivement aux choses par la voie de l'intelligence pure, sans immixtion aucune du vouloir; il en éprouve le besoin même. Cet intérêt le transporte alors dans une région à laquelle la douleur est essentiellement étrangère, pour ainsi dire, dans l'atmosphère des dieux à la vie facile, θεων ρεια ξωοντων. Pendant qu'ainsi l'existence du reste des hommes s'écoule dans l'engourdissement, et que leurs rêves et leurs


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