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Les Maîtres sonneurs. George SandЧитать онлайн книгу.

Les Maîtres sonneurs - George Sand


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Brulette. Si c'est la Mariton que tu aimes dans son fils, à la bonne heure; mais, alors, je souhaiterais d'avoir la Mariton pour ma mère: ça me vaudrait encore mieux que d'être ton cousin.

      —Laisse donc dire des sottises comme ça à mes autres galants, répondit Brulette en rougissant un peu; car aucun compliment ne l'avait jamais fâchée, encore qu'elle se donnât l'air d'en rire.

      Et, comme nous sortions du champ, vis-à-vis de ma maison, elle y entra avec moi pour dire bonjour à ma sœur.

      Mais ma sœur était sortie et, à cause de ses moutons qui étaient sur le chemin, Brulette ne la voulut pas attendre. Pour la retenir un peu, j'inventai de lui retirer ses sabots pour en ôter les galoches de neige et les embraiser; et, la tenant ainsi par les pattes, puisqu'elle fut obligée de s'asseoir en m'attendant, j'essayai de lui dire, mieux que je n'avais encore osé le faire, l'ennui que l'amour d'elle m'avait amassé sur le cœur.

      Mais voyez le diable! jamais je ne pus trouver le fin mot de ce discours-là. J'aurais bien lâché le second et le troisième, mais le premier ne put sortir. J'en avais la sueur au front. La fillette aurait bien pu m'aider, si elle l'eût voulu, car elle connaissait l'air de ma chanson; d'autres le lui avaient déjà seriné; mais, avec elle, il fallait de la patience et du ménagement, et encore que je ne fusse point tout à fait nouveau dans les discours de galanterie, ce que j'en avais échangé avec d'autres moins difficiles que Brulette, à seules fins de m'enhardir, ne m'avait rien enseigné de bon à dire à une jeunesse de grand prix comme était ma cousine.

      Tout ce que je sus faire fut de revenir sur la critique de son favori Joset. Elle en rit d'abord, et peu à peu, voyant que j'en voulais faire un blâme sérieux, elle prit un air plus sérieux encore.—Laissons ce pauvre malheureux tranquille, dit-elle: il est assez à plaindre.

      —Mais en quoi, et pourquoi? Est-il poitrinaire ou enragé, que tu crains qu'on y touche?

      —Il est pis que ça, répondit Brulette, il est égoïste.

      Égoïste était un mot de monsieur le curé, que Brulette avait retenu et qui n'était point usité chez nous de mon temps. Comme Brulette avait une grande mémoire, elle disait comme cela quelquefois des paroles que j'aurais pu retenir aussi, mais que je ne retenais point, et parlant, n'entendais point.

      J'eus la mauvaise honte de ne pas oser lui en demander l'explication et d'avoir l'air de m'en payer. Je m'imaginai d'ailleurs que c'était une maladie mortelle que Joseph avait, et qu'une si grande disgrâce condamnait toutes mes injustices. Je demandai pardon à Brulette de l'avoir tourmentée, ajoutant:

      —Si j'avais su plus tôt ce que tu me dis, je n'aurais eu ni fiel ni rancune contre ce pauvre garçon.

      —Comment ne t'en es-tu jamais aperçu? reprit-elle. Ne vois-tu pas comme il se laisse prévenir et obliger, sans avoir jamais l'idée d'en faire un remercîment; comme le moindre oubli l'offense, comme la moindre plaisanterie le choque, comme il boude et souffre à toute chose qui ne serait point remarquée d'un autre, et comme il faut toujours mettre du sien dans l'amitié qu'on a pour lui, sans qu'il comprenne que ce n'est point son dû, mais le rendu qu'on fait à Dieu, pour l'amour du prochain?

      —C'est donc l'effet de sa maladie? dis-je, un peu intrigué des explications de Brulette.

      —N'est-ce point la pire qu'on puisse avoir dans le cœur? répondit-elle.

      —Et sa mère sait-elle qu'il a comme ça dans le cœur une maladie sans remède?

      —Elle s'en doute bien, mais tu comprends que je ne lui en parle point, de crainte de l'affliger.

      —Et n'a-t-on point tenté quelque chose pour sa guérison?

      —J'y ai fait et j'y ferai encore mon possible, répondit elle, continuant un propos où l'on ne s'entendait pas du tout; mais je crois que mes ménagements augmentent son mal.

      —Il est bien vrai, ajoutai-je, après avoir réfléchi, que ce garçon a toujours eu, dans son air, quelque chose de singulier. Ma grand'mère, qui est morte, et tu sais qu'elle se piquait de connaissances sur l'avenir, disait qu'il avait le malheur écrit sur la figure, et qu'il était condamné à vivre dans les peines, ou à mourir dans la fleur de ses ans, à cause d'une ligne qu'il avait dans le front; et, depuis ce temps-là, je te confesse que quand Joset se chagrine, je crois voir cette ligne de disgrâce, encore que je ne sache point où ma grand'mère la voyait. Alors, j'ai comme peur de lui, ou plutôt de son destin, et je me sens porté à lui épargner tout reproche et tout malaise, comme à quelqu'un qui n'a pas longtemps à jouir de la vie.

      —Bah! répondit Brulette en riant, voilà les rêveries de ma grand'tante; je me les rappelle bien. Ne t'a-t-elle point dit aussi que les yeux clairs, comme sont ceux de Joseph, voient les esprits et toutes choses cachées? Mais moi, je n'en crois rien, non plus qu'au danger de mort pour lui. On vit longtemps avec l'esprit fait comme il l'a; on se soulage en tourmentant les autres, et on peut bien les enterrer tous, en les menaçant à toute heure de se laisser mourir.

      Je n'y comprenais plus rien, et j'allais questionner encore, quand Brulette me redemanda ses chaussures où elle fourra lestement ses pieds, bien que les sabots fussent si petits que je n'avais pas pu y fourrer ma main. Alors, rappelant son chien et retroussant sa jupe, elle me laissa tout soucieux et tout ébahi de ce qu'elle m'avait conté, et aussi peu avancé avec elle que le premier jour.

      Le dimanche ensuivant, comme elle partait pour la messe de Saint-Chartier, où elle allait plus volontiers qu'à celle de notre paroisse, à cause que l'on dansait sur la place entre la messe et les vêpres, je lui demandai de l'accompagner.

      —Non, me dit-elle, j'y vas avec mon grand-père, et il n'aime pas à me voir suivie sur les chemins par un tas de galants.

      —Je ne suis point un tas de galants, lui dis-je, je suis ton cousin, et jamais mon oncle ne m'a ôté de son chemin.

      —Eh bien, reprit-elle, ôte-toi du mien, pour aujourd'hui seulement; mon père et moi nous voulons causer avec Joset, qui est là dans la maison et qui doit nous suivre à la messe.

      —C'est donc qu'il vient vous demander en mariage, et que vous êtes bien aise de l'écouter?

      —Est-ce que tu es fou, Tiennet? Après ce que je t'ai dit de Joset?

      —Tu m'as dit qu'il avait une maladie qui le ferait vivre plus longtemps qu'un autre, et je ne vois pas en quoi ça peut me tranquilliser.

      —Te tranquilliser de quoi? fit Brulette étonnée. Quelle maladie? Où as-tu égaré tes esprits? Allons, je crois que tous les hommes sont fous!

      Et, prenant le bras de son grand-père qui venait à elle avec Joseph, elle partit légère comme un duvet et gaie comme une fauvette, tandis que mon brave homme d'oncle, qui ne voyait rien au-dessus d'elle, souriait aux passants et avait l'air de leur dire: «Ce n'est pas vous qui avez une fille pareille à montrer!»

      Je les suivis de loin pour voir si Joseph se familiariserait avec elle en chemin, s'il lui prendrait le bras, si le vieux les laisserait aller ensemble. Il n'en fut rien. Joseph marcha tout le temps à la gauche de mon oncle, tandis que Brulette marchait à droite, et ils avaient l'air de causer sérieusement.

      À la sortie de la messe, je demandai à Brulette de danser avec moi.—Oh! tu t'y prends bien tard, me dit-elle, j'ai promis au moins quinze bourrées, et il faudra que tu reviennes vers l'heure de vêpres.

      Ce n'était pas Joseph qui, dans cette affaire-là, pouvait me donner du dépit, car il ne dansait jamais, et, pour m'ôter celui de voir Brulette entourée de ses autres amoureux, je suivis Joseph à l'auberge du Bœuf couronné, où il allait voir sa mère et où je voulais tuer le temps avec quelques amis.

      J'étais un peu fréquentier du cabaret, comme je vous ai dit: non à cause de la bouteille, qui ne m'a jamais mis hors de sens, mais pour l'amour de la compagnie, de la causette et de la chanson. J'y trouvai plusieurs garçons et filles de connaissance avec lesquels je m'attablai, tandis que Joseph s'assit dans un coin, ne buvant goutte, ne disant mot, et se


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