Эротические рассказы

Son Excellence Eugène Rougon. Emile ZolaЧитать онлайн книгу.

Son Excellence Eugène Rougon - Emile Zola


Скачать книгу
de Marsy avec un emportement d'hommes politiques se ruant sur un adversaire. Les mots grossiers, les accusations abominables, les histoires vraies exagérées jusqu'au mensonge, pleuvaient dru. Du Poizat, qui avait connu Marsy autrefois, avant l'empire, affirmait qu'il était alors entretenu par sa maîtresse, une baronne dont il avait mangé les diamants en trois mois. M. Kahn prétendait que pas une affaire véreuse ne traînait sur la place de Paris, sans qu'on trouvât dedans la main de Marsy. Et ils s'échauffaient l'un l'autre, ils se renvoyaient des faits de plus en plus forts: dans une entreprise de mine, Marsy avait touché un pot-de-vin de quinze cent mille francs; il venait d'offrir, le mois dernier, un hôtel, à la petite Florence, des Bouffes, une bagatelle de six cent mille francs, sa part d'un trafic sur les actions des chemins de fer du Maroc; il n'y avait pas huit jours enfin, la grande affaire des canaux égyptiens, lancée par des créatures à lui, s'était écroulée avec un immense scandale, les actionnaires ayant su que pas un coup de pioche n'avait été donné, depuis deux ans qu'ils opéraient des versements. Puis, ils se jetèrent sur sa personne elle-même, s'efforçant de rapetisser sa haute mine d'aventurier élégant, parlant de maladies anciennes qui lui joueraient plus tard un mauvais tour, allant jusqu'à attaquer la galerie de tableaux qu'il réunissait alors.

      «C'est un bandit tombé dans la peau d'un vaudevilliste», finit par dire Du Poizat.

      Rougon releva lentement la tête. Il regarda les deux hommes de ses gros yeux.

      «Vous voilà bien avancés, dit-il. Marsy fait ses affaires, parbleu! comme vous voulez faire les vôtres.... Nous ne nous entendons guère. Si je puis même lui casser les reins quelque jour, je les lui casserai volontiers.

      Mais tout ce que vous racontez là n'empêche pas que Marsy soit d'une jolie force. Si la fantaisie l'en prenait, il ne ferait qu'une bouchée de vous deux, je vous en préviens.».

      Et il quitta son fauteuil, las d'être assis, étirant ses membres. Puis, il ajouta, dans un gros bâillement:

      «D'autant plus, mes bons amis, que maintenant je ne pourrais plus me mettre en travers.

      —Oh! si vous vouliez, murmura Du Poizat avec un sourire mince, vous mèneriez Marsy fort loin. Vous avez bien ici quelques papiers qu'il achèterait cher.

      Tenez, là-bas, le dossier Lardenois, cette aventure dans laquelle il a joué un singulier rôle. Je reconnais une lettre de lui, très curieuse, que je vous ai apportée moi-même, dans le temps.» Rougon était allé jeter dans la cheminée les papiers dont il avait peu à peu empli la corbeille. La coupe de bronze ne suffisait plus.

      «On s'assomme, on ne s'égratigne pas, dit-il en haussant dédaigneusement les épaules. Tout le monde a de ces lettres bêtes qui traînent chez les autres.» Et il prit la lettre, l'enflamma à la bougie, s'en servit comme d'une allumette pour mettre le feu au tas de papiers, dans la cheminée. Il resta là un instant, accroupi, énorme, à surveiller les feuilles embrasées qui roulaient jusque sur le tapis. Certains gros papiers administratifs noircissaient, se tordaient comme des lames de plomb; des billets, des chiffons salis de vilaines écritures, brûlaient avec des petites langues bleues; tandis que, dans le brasier ardent, au milieu d'un pullulement d'étincelles, des fragments consumés restaient intacts, lisibles encore.

      A ce moment, la porte s'ouvrit, toute grande. Une voix disait en riant:

      «Bien, bien, je vous excuserai, Merle.... Je suis de la maison. Si vous m'empêchiez d'entrer par ici, je ferais le tour par la salle des séances, parbleu!» C'était M. d'Escorailles, que Rougon, depuis six mois, avait fait nommer auditeur au Conseil d'État. Il amenait à son bras la jolie Mme Bouchard, toute fraîche dans une toilette claire de printemps. «Allons, bon! des femmes, maintenant!» murmura Rougon.

      Il ne quitta pas la cheminée tout de suite. Il demeura par terre, tenant la pelle, sous laquelle il étouffait la flamme, de peur d'incendie. Et il levait sa large face, l'air maussade. M. d'Escorailles ne se déconcerta pas.

      Lui et la jeune femme, dès le seuil, avaient cessé de se sourire, pour prendre une figure de circonstance.

      «Cher maître, dit-il, je vous amène une de vos amies qui tenait absolument à vous apporter ses regrets.... Nous avons lu le Moniteur ce matin...

      —Vous avez lu le Moniteur, vous autres», gronda Rougon qui se décida enfin à se mettre debout.

      Mais il aperçut une personne qu'il n'avait pas encore vue. Il murmura, après avoir cligné les yeux:

      «Ah! monsieur Bouchard.» C'était le mari, en effet. Il venait d'entrer, derrière les jupes de sa femme, silencieux et digne. M. Bouchard avait soixante ans, la tête toute blanche, l'œil éteint, la face comme usée par ses vingt-cinq années de service administratif. Lui, ne prononça pas une parole. Il prit d'un air pénétré la main de Rougon, qu'il secoua trois fois, de haut en bas, énergiquement.

      «Eh bien, dit ce dernier, vous êtes très gentils d'être tous venus me voir; seulement, vous allez diablement me gêner.... Enfin, mettez-vous de ce côté-là... Du Poizat, donnez votre fauteuil à madame.» Il se tournait, lorsqu'il se trouva en face du colonel Jobelin.

      «Vous aussi, colonel!» cria-t-il.

      La porte était restée ouverte, Merle n'avait pu s'opposer à l'entrée du colonel, qui montait l'escalier derrière les talons des Bouchard. Il tenait son fils par la main, un grand galopin de quinze ans, alors élève de troisième au lycée Louis-le-Grand.

      «J'ai voulu vous amener Auguste, dit-il. C'est dans le malheur que se révèlent les vrais amis.... Auguste, donne une poignée de main.» Mais Rougon s'élançait vers l'anti-chambre, en criant:

      «Fermez donc la porte, Merle! A quoi pensez-vous! Tout Paris va entrer.» L'huissier montra sa face calme, en disant:

      «C'est qu'ils vous ont vu, monsieur le président.» Et il dut s'effacer pour laisser passer les Charbonnel.

      Ils arrivaient sur une même ligne, sans se donner le bras, soufflant, désolés, ahuris. Ils parlèrent en même temps.

      «Nous venons de voir le Moniteur.... Ah! quelle nouvelle! comme votre pauvre mère va être désolée! Et nous, dans quelle triste position cela nous met!» Ceux-là, plus naïfs que les autres, allaient tout de suite exposer leurs petites affaires. Rougon les fit taire.

      Il poussa un verrou caché sous la serrure de la porte, en murmurant qu'on pouvait l'enfoncer, maintenant. Puis, voyant que pas un de ses amis ne semblait décidé à quitter la place, il se résigna, il tâcha d'achever sa besogne, au milieu des neuf personnes qui emplissaient le cabinet. Le déménagement des papiers avait fini par bouleverser la pièce. Sur le tapis, une débandade de dossiers traînait, si bien que le colonel et M. Bouchard, qui voulurent gagner l'embrasure d'une fenêtre, durent prendre les plus grandes précautions pour ne pas écraser en chemin quelque affaire importante. Tous les sièges étaient encombrés de paquets ficelés; Mme Bouchard seule avait pu s'asseoir sur un fauteuil resté libre; et elle souriait aux galanteries de Du Poizat et de M. Kahn, pendant que, M. d'Escorailles, ne trouvant plus de tabouret, lui glissait sous les pieds une épaisse chemise bleue bourrée de lettres. Les tiroirs du bureau, culbutés dans un coin, permirent aux Charbonnel de s'accroupir un instant, pour reprendre haleine; tandis que le jeune Auguste, ravi de tomber dans ce remue ménage, furetait, disparaissait derrière la montagne de cartons, au milieu de laquelle Delestang semblait se retrancher. Ce dernier faisait beaucoup de poussière, en jetant de haut les journaux de la bibliothèque.

      Mme Bouchard eut une légère toux.

      «Vous avez tort de rester dans cette saleté», dit Rougon, occupé à vider les cartons qu'il avait prié Delestang de ne point toucher.

      Mais la jeune femme, toute rose d'avoir toussé, lui assura qu'elle était très bien, que son chapeau ne craignait pas la poussière. Et la bande se lança dans les condoléances. L'empereur, vraiment, ne se souciait guère des intérêts du pays, pour se laisser circonvenir par des personnages si peu dignes de sa confiance. La France faisait une perte. D'ailleurs, c'était toujours ainsi: une grande intelligence devait liguer contre


Скачать книгу
Яндекс.Метрика