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Orgueil et préjugés. Jane AustenЧитать онлайн книгу.

Orgueil et préjugés - Jane Austen


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m’absenter quelquefois le dimanche, lorsqu’un autre ecclésiastique prend ma place. Je vous prie, monsieur, d’offrir mes hommages respectueux à vos dames et de croire à la parfaite considération de

      » votre ami,

      » William Colins.

      „À quatre heures nous devons donc attendre ce beau pacificateur, dit M. Bennet en fermant la lettre: cela m’a tout l’air d’un jeune homme bien consciencieux et bien poli, et cela doit être assurément une bonne connaissance à faire, surtout si lady Catherine lui permet de revenir souvent nous voir.

      » — Il y a du bon dans ce qu’il dit au sujet de nos filles; et s’il songeait à leur offrir quelque dédommagement, ce ne serait pas moi qui l’en détournerais.

      » — Quoiqu’il soit difficile, dit Hélen, de deviner de quelle manière il peut nous dédommager de la perte d’un bien qu’il croit légitimement à nous, le désir qu’il en a est certainement à son avantage.“

      Élisabeth était principalement frappée de son extrême déférence pour lady Catherine; et de sa bonne intention de baptiser, de marier et d’enterrer ses paroissiens lorsqu’il en serait requis.

      „Il faut, dit-elle, que ce soit un plaisant original, je me le figure à son style; quel galimathias! Que veut-il nous dire avec ses excuses d’être l’héritier de Longbourn? Nous ne pensons pas qu’il voulût s’en dispenser: s’il le pouvait… Le croyez-vous, mon père, un homme bien sensé?

      » — Non, ma chère, je ne le crois pas; je m’attends bien à le trouver tout le contraire. Il y a dans sa lettre un mélange de bassesse et de suffisance qui promet beaucoup…: je suis impatient de le connaître!

      » — Son style, dit Mary, me paraît assez beau: la branche d’olivier n’est pas une idée neuve, mais il faut convenir qu’elle est heureusement appliquée.“

      Ni la lettre ni l’écrivain n’intéressèrent Catherine et Lydia; il était impossible que leur cousin portât un habit rouge, aussi ne les occupa-t-il guère.

      Quant à Mme Bennet, les expressions de M. Colins avaient dissipé sa mauvaise humeur, et elle attendit sa visite avec une tranquillité qui étonna également son mari et ses filles.

      M. Colins arriva à l’heure marquée, et fut reçu par toute la famille avec beaucoup de politesses. M. Bennet, il est vrai, parla peu; mais les dames étaient très-disposées à causer, et M. Colins ne semblait pas avoir besoin d’encouragement ni aucune envie de se taire… Quelques momens après s’être assis, il fit compliment à Mme Bennet sur la beauté de ses filles, disant avoir beaucoup entendu parler d’elles et célébrer leurs charmes; mais, dans cette occurrence, la vérité lui semblait fort au-dessus de la renommée, et il ajouta qu’il ne doutait nullement qu’elle ne les vît toutes bien mariées.

      Cette galanterie ne fut pas également appréciée par tous les auditeurs, mais Mme Bennet, que flattaient tous les complimens, lui répondit d’un air empressé:

      „Vous êtes bien bon, monsieur, et je le souhaite de tout mon cœur, sans quoi elles seront bien à plaindre; des affaires arrangées d’une manière si étrange…!

      » — Vous voulez parler peut-être, madame, de la substitution?

      » — Ah! monsieur, j’y pense continuellement; il faut avouer que c’est une chose bien triste pour mes pauvres filles. Ce n’est pas que je veuille vous blâmer, je sais fort bien que le hasard seul en est cause. On ne peut jamais deviner à qui les terres appartiendront une fois qu’elles sont substituées.

      » — Je sens, madame, tout le tort que cela fait à mes charmantes cousines, et j’aurais beaucoup à dire sur ce sujet; mais je crains d’aller trop vite et de paraître peu mesuré. Pour le présent, je me contenterai d’assurer ces demoiselles de ma très-humble admiration. Je n’en dis pas davantage…; mais quand nous nous connaîtrons mieux…“

      Il fut interrompu par un domestique qui vint dire que le dîner était servi. Ces demoiselles se regardèrent en souriant; elles ne furent pas le seul objet de l’admiration de M. Colins: l’antichambre, la salle à manger, les meubles furent examinés et approuvés. Ces louanges auraient été au cœur de Mme Bennet si elle n’avait pas supposé qu’il les regardait comme devant un jour lui appartenir. Le dîner fut aussi loué, et il voulut savoir laquelle de ces charmantes cousines était auteur de mets si délicatement préparés; mais ici Mme Bennet le redressa vivement en l’assurant, avec un peu d’humeur, qu’elle était bien dans le cas d’avoir un cuisinier, et que ses filles n’avaient que faire à la cuisine… Là-dessus M. Colins se confondit en excuses: elle eut beau l’assurer, de l’air le plus radouci, qu’elle n’était point offensée, il n’en continua pas moins, sur le même ton, plus d’un quart d’heure, lui demandant toujours mille et mille pardons.

      CHAPITRE XIV

      Pendant le dîner, M. Bennet dit à peine deux mots; mais lorsque les domestiques furent retirés il crut qu’il était temps de causer avec son hôte, et pour cela choisit un sujet où il s’attendait à le voir briller, en disant qu’il était bien heureux d’avoir une telle protectrice. L’intérêt que prenait à lui lady Catherine de Brough paraissait très-marqué. M. Bennet ne pouvait mieux rencontrer; l’éloquence de son convive, se développant sur ce sujet, en augmenta l’air de solennité qui lui était ordinaire; d’un ton majestueux il protesta n’avoir vu de sa vie une telle conduite dans une personne d’un si haut rang: il recevait journellement des marques de l’affabilité et de la condescendance de lady Catherine; elle avait daigné approuver les deux sermons qu’il eut l’honneur de prononcer en sa présence. Elle l’avait deux fois invité à dîner avec elle à Rosings, et de temps en temps l’envoyait chercher pour faire un quatrième au whist. „Bien des gens s’imaginent, continua-t-il, que lady Catherine est fière, quant à moi je ne l’ai jamais trouvée telle… elle me parle, comme à tout le monde, avec tant de bonté! me permet de voir mes voisins, et me laisse quelquefois m’absenter de ma cure; elle a même daigné m’engager à me marier, en me recommandant surtout d’épouser une femme comme il faut. J’ai eu l’avantage de la recevoir une fois dans mon humble demeure, et celui de la voir approuver tous les changemens que j’y ai faits: elle a bien voulu elle-même m’en indiquer de nouveaux, quelques planches à placer dans les cabinets du premier étage…

      » — Cette conduite est en vérité bien polie et bien attentive, dit Mme Bennet, je ne doute nullement que lady Catherine ne soit une femme accomplie; il serait à désirer que toutes les grandes dames lui ressemblassent. Demeure-t-elle près de vous, monsieur?

      » — Le jardin dans lequel est situé mon humble presbytère n’est séparé que par une petite avenue du parc de Rosings, noble séjour de la seigneurie.

      » — Ne m’avez-vous pas dit qu’elle était veuve; a-t-elle des enfans?

      » — Elle n’a qu’une fille unique, héritière de Rosings et d’une immense fortune.

      » — Ah! s’écria Mme Bennet avec un profond soupir, bien des personnes ne sont pas si heureuses. Est-elle belle?

      » — C’est la plus charmante femme qu’on puisse voir: lady Catherine déclare elle-même que, quant à la beauté, Mlle de Brough passe de bien loin les plus belles personnes de son sexe; par cet air surtout qui annonce la haute qualité. Il est fâcheux que la faiblesse de sa constitution l’ait empêchée de cultiver tous les talens pour lesquels elle semble née, comme je le tiens de la dame qui a présidé à son éducation, et qui est encore auprès d’elle; mais elle est parfaitement aimable et daigne souvent se faire conduire dans son phaéton jusques à la grille de mon humble demeure.

      » — A-t-elle été présentée à la cour?

      » — Je ne me rappelle pas avoir vu son nom dans les journaux. Sa mauvaise santé l’empêche malheureusement de pouvoir rester à Londres, et, comme je l’ai dit moi-même à lady Catherine, prive


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