Эротические рассказы

Journal d'un voyageur pendant la guerre. Жорж СандЧитать онлайн книгу.

Journal d'un voyageur pendant la guerre - Жорж Санд


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soyez pas surpris, si vos adversaires vous crient que vous êtes plus occupés de maintenir la république que de sauver le pays. Vos adversaires ne sont pas tous injustes et prévenus. Je crois que le grand nombre veut la délivrance du pays; mais plus vous proclamez la république, plus ils veulent, en vertu de la liberté qu'elle leur promet, se servir de leurs droits politiques. Sommes-nous donc dans une impasse? Le trouble des événements est-il entré dans les esprits d'élite comme dans les esprits vulgaires? L'égoïsme est-il seul à savoir ce qu'il lui faut et ce qu'il veut?

27 septembre.

      Nous sommes difficiles à satisfaire en tout temps, nous autres Français. Nous sommes la critique incarnée, et dans les temps difficiles la critique tourne à l'injure. En vertu de notre expérience, qui est terrible, et de notre imagination, qui est dévorante, nous ne voulons confier nos destinées qu'à des êtres parfaits; n'en trouvant pas, nous nous éprenons de l'inconnu, qui nous leurre et nous perd. Aussi tout homme qui s'empare du pouvoir est-il entouré du prestige de la force ou de l'habileté. Qu'il fasse autrement que les autres, c'est tout ce qu'on lui demande, et on ne regarde pas au commencement si c'est le mal ou le bien. Admirer, c'est le besoin du premier jour, estimer ne semble pas nécessaire, éplucher est le besoin du lendemain, et le troisième jour on est bien près déjà de haïr ou de mépriser.

      Un gouvernement d'occasion à plusieurs têtes ne répond pas au besoin d'aventures qui nous égare. Quels que soient le patriotisme et les talents d'un groupe d'hommes choisis d'avance par l'élection pour représenter la lutte contre le pouvoir absolu, ce groupe ne peut fonctionner à souhait qu'en vertu d'une entente impossible à contrôler. On suppose toujours que des idées contradictoires le paralysent, et le paysan dit:

      – Comment voulez-vous qu'ils s'entendent? Quand nous sommes trois au coin du feu à parler des affaires publiques, nous nous disputons!

      Aussi le simple, qui compose la masse illettrée, veut toujours un maître; il a le monothéisme du pouvoir. La culture de l'esprit amène l'analyse et la réflexion, qui donnent un résultat tout contraire. La raison nous enseigne qu'un homme seul est un zéro, que la sagesse a besoin du concours de plusieurs, et que le droit s'appuie sur l'assentiment de tous. Un homme sage et grand à lui tout seul est une si rare exception, qu'un gouvernement fondé sur le principe du monothéisme politique est fatalement une cause de ruine sociale. Pour faire idéalement l'homme sage et fort qui est un être de raison, il faut la réunion de plusieurs hommes relativement forts et sages, travaillant, sous l'inspiration d'un principe commun, à se compléter les uns les autres, à s'enrichir mutuellement de la richesse intellectuelle et morale que chacun apporte au conseil.

      Ce raisonnement, qui entre aujourd'hui dans toutes les têtes dégrossies par l'éducation, n'est pas encore sensible à l'ignorant; il part de lui-même, de sa propre ignorance, pour décréter qu'il faut un plus savant que lui pour le conduire, et au-dessus de celui-là un plus savant encore pour conduire l'autre, et toujours ainsi, jusqu'à ce que le savoir se résume dans un fétiche qu'il ne connaîtra jamais, qu'il ne pourra jamais comprendre, mais qui est né pour posséder le savoir suprême. Celui qui juge ainsi est toujours l'homme du moyen âge, le fataliste qui se refuse aux leçons de l'expérience; il ne peut profiter des enseignements de l'histoire, il ne sait rien de l'histoire. Pauvre innocent, il ne sait pas encore que les castes en se confondant ont cessé de représenter des réserves d'hommes pour le commandement ou la servitude, qu'il n'y a plus de races prédestinées à fournir un savant maître pour les foules stupides, que le savoir s'est généralisé sans égard aux priviléges, que l'égalité s'est faite, et que lui seul, l'ignorant, est resté en dehors du mouvement social. Louis Blanc avait eu une véritable révélation de l'avenir, lorsqu'en 1848 il opinait pour que le suffrage universel ne fût proclamé qu'avec cette restriction: L'instruction gratuite obligatoire est entendue ainsi, que tout homme ne sachant pas lire et écrire dans trois ou cinq ans à partir de ce jour perdra son droit d'électeur. – Je ne me rappelle pas les termes de la formule, mais je ne crois pas me tromper sur le fond. – Cette sage mesure nous eût sauvés des fautes et des égarements de l'empire, si elle eût été adoptée. Tout homme qui se fût refusé au bienfait de l'éducation se fût déclaré inhabile à prendre part au gouvernement, et on eût pu espérer que la vérité se ferait jour dans les esprits.

27 au soir.

      Nous avons été voir un vieil ami à Chambon. Cette petite ville, qui m'avait laissé de bons souvenirs, est toujours charmante par sa situation; mais le progrès lui a ôté beaucoup de sa physionomie: on a exhaussé ou nivelé, suivant des besoins sanitaires bien entendus, le rivage de la Vouèze, ce torrent de montagne qui se répandait au hasard dans la ville. De là, beaucoup d'arbres abattus, beaucoup de lignes capricieuses brisées et rectifiées. On n'est plus à même la nature comme autrefois. Le torrent est emprisonné, et comme il n'est pas méchant en ce moment-ci, il paraît d'autant plus triste et humilié. Mon Aurore s'y promène à pied sec là où jadis il passait en grondant et se pressait en flots rapides et clairs. Aujourd'hui des flaques mornes irisées par le savon sont envahies par les laveuses; mais la gorge qui côtoie la ville est toujours fraîche, et les flancs en sont toujours bien boisés. Nous avions envie de passer là quelques jours, c'était même mon projet quand j'ai quitté Nohant. Je m'assure d'une petite auberge adorablement située où, en été, l'on serait fort bien; mais nos amis ne veulent pas que nous les quittions: le temps se refroidit sensiblement, et ce lieu-ci est particulièrement froid. Je crains pour nos enfants, qui ont été élevées en plaine, la vivacité de cet air piquant. J'ajourne mon projet. Je fais quelques emplettes et suis étonnée de trouver tant de petites ressources dans une si petite ville. Ces Marchois ont plus d'ingéniosité dans leur commerce, par conséquent dans leurs habitudes, que nos Berrichons.

      Notre bien cher ami le docteur Paul Darchy est installé là depuis quelques années. Son travail y est plus pénible que chez nous; mais il est plus fructueux pour lui, plus utile pour les autres. Le paysan marchois semble revenu des sorciers et des remègeux. Il appelle le médecin, l'écoute, se conforme à ses prescriptions, et tient à honneur de le bien payer. La maison que le docteur a louée est bien arrangée et d'une propreté réjouissante. Il a un petit jardin d'un bon rapport, grâce à un puits profond et abondant qui n'a pas tari, et au fumier de ses deux chevaux. Nous sommes tout étonnés de voir des fleurs, des gazons verts, des légumes qui ne sont pas étiolés, des fruits qui ne tombent pas avant d'être mûrs. Ce petit coin de terre bordé de murailles a caché là et conservé le printemps avec l'automne.

      Il me vint à l'esprit de dire au docteur:

      – Cher ami, lorsqu'il y a dix ans la mort me tenait doucement endormie, pourquoi les deux amis fidèles qui me veillaient nuit et jour, toi et le docteur Vergne de Cluis, m'avez-vous arrachée à ce profond sommeil où mon âme me quittait sans secousse et sans déchirement? Je n'aurais pas vu ces jours maudits où l'on se sent mourir avec tout ce que l'on aime, avec son pays, sa famille et sa race!

      Il est spiritualiste; il m'eût fait cette réponse:

      – Qu'en savez-vous? les âmes des morts nous voient peut-être, peut-être souffrent-elles plus que nous de nos malheurs.

      Ou celle-ci:

      – Elles souffrent d'autre chose pour leur compte; le repos n'est point où est la vie.

      Je ne l'ai donc pas grondé de m'avoir conservé la vie, sachant, comme lui, que c'est un mal et un bien dont il n'est pas possible de se débarrasser.

Boussac, 28 septembre.

      Nous sommes venus ici ce matin pour apporter du linge et des provisions à notre hôte Sigismond, installé depuis quelques jours comme sous-préfet, tandis que nous occupons avec sa femme et ses enfants sa maison de Saint-Loup, à sept lieues de Boussac. Il espérait que la paix mettrait une fin prochaine à cette situation exceptionnelle, et qu'après avoir fait acte de dévouement il pourrait donner vite sa démission et retourner à ses champs pour faire ses semailles et oublier à jamais les splendeurs du pouvoir. Il n'en est point ainsi, le voilà rivé à une chaîne: il ne s'agit plus de faire activer les élections et de faire respecter la liberté du vote; il s'agit d'organiser la défense et de maintenir l'ordre en inspirant la confiance. Il serait propre à ce rôle sur un plus grand théâtre, il préfère ce petit


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