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Valvèdre. Жорж СандЧитать онлайн книгу.

Valvèdre - Жорж Санд


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qui descendait lentement vers moi; je pouvais très-bien distinguer les figures, sauf celle de la dame en burnous dont le capuchon était relevé, et ne laissait à découvert qu'un oeil noir étrange et assez effrayant. Cet oeil se fixa sur le mien au moment où la voyageuse se trouva près de moi, et elle arrêta brusquement sa monture en tirant sur la bride, au point de faire trébucher le guide, et au risque de le faire tomber dans le précipice. Elle ne parut pas s'en soucier, et, m'adressant la parole d'une voix assez dure, elle me demanda si j'étais du pays. Sur ma réponse négative, elle allait passer outre, lorsque la curiosité me fit ajouter que j'y étais depuis deux jours, et que, si elle avait besoin d'un renseignement, j'étais peut-être à même de le lui donner.

      – Alors, reprit-elle, je vous demanderai si vous avez entendu dire que le comte de Valvèdre fût dans les environs.

      – Je sais qu'un M. de Valvèdre est à cette heure en excursion sur le mont Rose.

      – Sur le mont Rose? tout en haut?

      – Dans les glaciers, voilà tout ce que je sais.

      – Ah! je devais m'attendre à cela! dit la dame avec un accent de dépit.

      – Oh! mon Dieu! ajouta la seconde amazone, qui s'était approchée pour écouter mes réponses, voilà ce que je craignais!

      – Rassurez-vous, mesdames; le temps est magnifique, le sommet très-clair, et personne n'est inquiet de l'expédition. Tout fait croire aux gens du pays qu'elle ne sera pas dangereuse.

      – Je vous remercie pour votre bon augure, répondit cette personne à la figure ouverte et à la voix douce; madame de Valvèdre et moi, sa belle-soeur, nous vous en savons gré.

      Mademoiselle de Valvèdre m'adressa ce doux remerciement en passant devant moi pour suivre sa belle-soeur, qui s'était déjà remise en marche. Je suivis des yeux le plus longtemps possible la surprenante apparition. Madame de Valvèdre se retourna, et, dans ce mouvement, je vis son visage tout entier. C'était donc là cette femme qui avait tant piqué ma curiosité, grâce aux réticences dédaigneuses d'Obernay! Elle ne me plaisait point. Elle me paraissait maigre et colorée, deux choses qui jurent ensemble. Son regard était dur et sa voix aussi, ses manières brusques et nerveuses. Ce n'était pas là un type que j'eusse jamais rêvé; mais comme, en revanche, mademoiselle de Valvèdre me semblait douce et d'une grâce sympathique! D'où vient qu'Obernay ne m'avait point dit que son ami eût une soeur? L'ignorait-il? ou bien était-il amoureux d'elle et jaloux de son secret au point de ne vouloir pas seulement laisser deviner l'existence de la personne aimée?

      Je doublai le pas, et j'arrivai au hameau peu d'instants après les voyageuses. Madame de Valvèdre était déjà devenue invisible; mais sa belle-soeur errait encore par les escaliers, s'enquérant de toutes choses relatives à l'excursion de son frère. Dès qu'elle me vit, elle me questionna d'un air de confiance en me demandant si je ne connaissais pas Henri Obernay.

      – Oui, sans doute, répondis-je, il est mon meilleur ami.

      – Oh! alors, reprit-elle avec abandon, vous êtes Francis Valigny, de Bruxelles, et sans doute vous me connaissez déjà, moi? Il a dû vous dire que j'étais sa fiancée?

      – Il ne me l'a pas dit encore, répondis-je un peu troublé d'une si brusque révélation.

      – C'est qu'il attendait ma permission, apparemment. Eh bien, vous lui direz que je l'autorise à vous parler de moi, pourvu qu'il vous dise de moi autant de bien qu'il m'en a dit de vous; mais vous, monsieur Valigny, parlez-moi de mon frère et de lui!.. Est-ce bien vrai qu'ils ne sont pas en danger?

      Je lui appris qu'Obernay n'avait suivi M. de Valvèdre que pendant une nuit, et qu'il allait rentrer.

      – Mais, ajoutai-je, devez-vous être inquiète à ce point de votre frère? N'êtes-vous pas habituée à le voir entreprendre souvent de pareilles courses?

      – Je devrais m'y habituer, répondit-elle simplement.

      En ce moment, madame de Valvèdre la fit appeler par une soubrette italienne d'accent et très-jolie de type. Mademoiselle de Valvèdre me quitta en me disant:

      – Allez donc voir si Henri revient de sa promenade, et apprenez-lui que Paule vient d'arriver.

      – Allons, pensai-je, silence à tout jamais devant elle, mon pauvre étourdi de coeur! Tu dois être le frère et rien que le frère de cette charmante fille. D'ailleurs, tu serais bien ridicule de vouloir lutter contre un rival aimé, et sans doute plus que toi digne de l'être. N'es-tu pas déjà un peu coupable d'avoir tressailli légèrement au frôlement de cette robe virginale?

      Obernay arrivait; je courus au-devant de lui pour l'avertir de l'événement. Sa figure rose passa au vermillon le plus vif, puis le sang se retira tout entier vers le coeur, et il devint pâle jusqu'aux lèvres. Devant cette franchise d'émotion, je lui serrai la main en souriant.

      – Mon cher ami, lui dis-je, je sais tout, et je t'envie, car tu aimes, et c'est tout dire!

      – Oui, j'aime de toute mon âme, s'écria-t-il, et tu comprends mon silence! A présent, parlons raison. Cette arrivée imprévue, qui me comble de joie, me cause aussi de l'inquiétude. Avec les caprices de… certaines personnes… ou de la destinée…

      – Dis les caprices de madame de Valvèdre. Tu crains de sa part quelque obstacle à ton bonheur?

      – Des obstacles, non! mais… des influences… Je ne plais pas beaucoup à la belle Alida!

      – Elle s'appelle Alida? C'est recherché, mais c'est joli, plus joli qu'elle! Je n'ai pas été émerveillé du tout de sa figure.

      – Bien, bien, n'importe… Mais, dis-moi, puisque tu l'as vue, sais-tu ce qu'elle vient faire ici?

      – Et comment diable veux-tu que je le sache? J'ai cru comprendre qu'une vive inquiétude conjugale…

      – Madame de Valvèdre inquiète de son mari?.. Elle ne l'est pas ordinairement; elle est si habituée…

      – Mais mademoiselle Paule?

      – Oh! elle adore son frère, elle; mais ce n'est certainement pas son ascendant qui a pu agir en quoi que ce soit sur sa belle-soeur. Toutes deux savent, d'ailleurs, que Valvèdre n'aime pas qu'on le suive et qu'on le tiraille pour le déranger de ses travaux. Il doit y avoir quelque chose là-dessous, et je cours m'en informer, s'il est possible de le savoir.

      Moi, je courus m'habiller, espérant que les voyageuses dîneraient dans la salle commune; mais elles n'y parurent pas. On les servit dans leur appartenant, et elles y retinrent Obernay. Je ne le revis qu'à la nuit close.

      – Je te cherche, me dit-il, pour te présenter à ces dames. On m'a chargé de t'inviter à prendre le thé chez elles. C'est une petite solennité; car, de la terrasse, nous verrons, à neuf heures, partir de la montagne une ou plusieurs fusées qui seront, de la part de Valvèdre, un avis télégraphique dont j'ai la clef.

      – Mais la cause de l'arrivée de ces dames? Je ne suis pas curieux, pourtant je désire bien apprendre que ce n'est pas pour toi un motif de chagrin ou de crainte.

      – Non, Dieu merci! Cette cause reste mystérieuse. Paule croit que sa belle-soeur était réellement inquiète de Valvèdre. Je ne suis pas aussi candide; mais Alida est charmante avec moi, et je suis rassuré. Viens.

      Madame de Valvèdre s'était emparée du logement de son mari, qui était assez vaste, eu égard aux proportions du chalet. Il se composait de trois chambres dans l'une desquelles Paule préparait le thé en nous attendant. Elle était si peu coquette, qu'elle avait gardé sa robe de voyage toute fripée et ses cheveux dénoués et en désordre sous son chapeau de paille. C'était peut-être un sacrifice qu'elle avait fait à Obernay de rester ainsi, pour ne pas perdre un seul des instants qu'ils pouvaient passer ensemble. Pourtant je trouvai qu'elle acceptait trop bien cet abandon de sa personne, et je pensai tout de suite qu'elle n'était pas assez femme pour devenir autre chose que la femme d'un savant. J'en félicitai Obernay dans mon coeur; mais tout sentiment d'envie ou de regret personnel fit place à une franche sympathie pour la bonté et la raison dont sa future était douée.

      Madame


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