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La Conquête de Plassans. Emile ZolaЧитать онлайн книгу.

La Conquête de Plassans - Emile Zola


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dommage que ça porte la soutane! Il aurait fait un fameux carabinier.

      Puis, au bout d'un silence, parlant seul, continuant à voix haute des réflexions qui le rendaient tout songeur:

      – Ils sont arrivés par le train de six heures trois quarts. Ils n'ont donc eu que le temps de passer chez l'abbé Bourrette et de venir ici… Je parie qu'ils n'ont pas dîné. C'est clair. Nous les aurions bien vus sortir pour aller à l'hôtel… Ah! par exemple, ça me ferait plaisir de savoir où ils ont pu manger.

      Rose, depuis un instant, rôdait dans la salle à manger, attendant que ses maîtres allassent se coucher, pour fermer les portes et les fenêtres.

      – Moi je le sais où ils ont mangé, dit-elle.

      Et comme Mouret se tournait vivement:

      – Oui, j'étais remontée pour voir s'ils ne manquait de rien. N'entendant pas de bruit, je n'ai point osé frapper; j'ai regardé par la serrure.

      – Mais c'est mal, très-mal, interrompit Marthe sévèrement. Vous savez bien, Rose, que je n'aime point cela.

      – Laisse donc, laisse donc! s'écria Mouret, qui, dans d'autres circonstances, se serait emporté contre la curieuse. Vous avez regardé par la serrure?

      – Oui, monsieur, c'était pour le bien.

      – Évidemment… Qu'est-ce qu'ils faisaient?

      – Eh bien! donc, monsieur, ils mangeaient… Je les ai vus qui mangeaient sur le coin du lit de sangle. La vieille avait étalé une serviette. Chaque fois qu'ils se servaient du vin, ils recouchaient le litre bouché contre l'oreiller.

      – Mais que mangeaient-ils?

      – Je ne sais pas au juste, monsieur. Ça m'a paru un reste de pâté, dans un journal. Ils avaient aussi des pommes, des petites pommes de rien du tout.

      – Et ils causaient, n'est-ce pas? Vous avez entendu ce qu'ils disaient?

      – Non, monsieur, ils ne causaient pas… Je suis restée un bon quart d'heure à les regarder. Ils ne disaient rien, pas ça, tenez! Ils mangeaient, ils mangeaient! Marthe s'était levée, réveillant Désirée, faisant mine de monter; la curiosité de son mari la blessait. Celui-ci se décida enfin à se lever également; tandis que la vieille Rose, qui était dévote, continuait d'une voix plus basse:

      – Le pauvre cher homme devait avoir joliment faim… Sa mère lui passait les plus gros morceaux et le regardait avaler avec un plaisir… Enfin, il va dormir dans des draps bien blancs. A moins que l'odeur des fruits ne l'incommode. C'est que ça ne sent pas bon dans la chambre; vous savez, cette odeur aigre des poires et des pommes. Et pas un meuble, rien que le lit dans un coin. Moi, j'aurais peur, je garderais la lumière toute la nuit.

      Mouret avait pris son bougoir. Il resta un instant debout devant Rose, résumant la soirée dans ce mot de bourgeois tiré de ses idées accoutumées:

      – C'est extraordinaire.

      Puis, il rejoignit sa femme au pied de l'escalier. Elle était couchée, elle dormait déjà, qu'il écoutait encore les bruits légers qui venaient de l'étage supérieur. La chambre de l'abbé était juste au-dessus de la sienne. Il l'entendit ouvrir doucement la fenêtre, ce qui l'intrigua beaucoup. Il leva la tête de l'oreiller, luttant désespérément contre le sommeil, voulant savoir combien de temps le prêtre resterait à la fenêtre. Mais le sommeil fut le plus fort; Mouret ronflait à poings fermés, avant d'avoir pu saisir de nouveau le sourd grincement de l'espagnolette.

      En haut, à la fenêtre, l'abbé Faujas, tète nue, regardait la nuit noire. Il demeura longtemps là, heureux d'être enfin seul, s'absorbant dans ces pensées qui lui mettaient tant de dureté au front. Sous lui, il sentait le sommeil tranquille de cette maison où il était depuis quelques heures, l'haleine pure des enfants, le souffle honnête de Marthe, la respiration grosse et régulière de Mouret. Et il y avait un mépris dans le redressement, de son cou de lutteur, tandis qu'il levait la tête comme pour voir au loin, jusqu'au fond de la petite ville endormie. Les grands arbres du jardin de la sous-préfecture faisaient une masse sombre, les poiriers de M. Rastoil allongeaient des membres maigres et tordus; puis, ce n'était plus qu'une mer de ténèbres, un néant, dont pas un bruit ne montait. La ville avait une innocence de fille au berceau.

      L'abbé Faujas tendit les bras d'un air de défi ironique, comme s'il voulait prendre Plassans pour l'étouffer d'un effort contre sa poitrine robuste. Il murmura:

      – Et ces imbéciles qui souriaient, ce soir, en me voyant traverser leurs rues!

      III

      Le lendemain, Mouret passa la matinée à épier son nouveau locataire. Cet espionnage allait emplir les heures vides qu'il passait au logis à tatillonner, à ranger les objets qui traînaient, à chercher des querelles à sa femme et à ses enfants. Désormais, il aurait une occupation, un amusement, qui le tirerait de sa vie de tous les jours. Il n'aimait pas les curés, comme il le disait, et le premier prêtre qui tombait dans son existence l'intéressait à un point extraordinaire. Ce prêtre apportait chez lui une odeur mystérieuse, un inconnu presque inquiétant. Bien qu'il fît l'esprit fort, qu'il se déclarât voltairien, il avait en face de l'abbé tout un étonnement, un frisson de bourgeois, où perçait une pointe de curiosité gaillarde.

      Pas un bruit ne venait du second étage. Mouret écouta attentivement dans l'escalier, il se hasarda même à monter au grenier. Comme il ralentissait le pas en longeant le corridor, un frôlement de pantoufles qu'il crut entendre derrière la porte, l'émotionna extrêmement. N'ayant rien pu surprendre de net, il descendit au jardin, se promena sous la tonnelle du fond, levant les yeux, cherchant à voir par les fenêtres ce qui se passait dans les pièces. Mais il n'aperçut pas même l'ombre de l'abbé. Madame Faujas, qui n'avait sans doute point de rideaux, avait tendu, en attendant, des draps de lit derrière les vitres.

      Au déjeuner, Mouret parut très-vexé.

      – Est-ce qu'ils sont morts, là-haut? dit-il en coupant du pain aux enfants. Tu ne les as pas entendus remuer, toi, Marthe?

      – Non, mon ami; je n'ai pas fait attention.

      Rose cria de la cuisine:

      – Il y a beau temps qu'ils ne sont plus là; s'ils courent toujours, ils sont loin.

      Mouret appela la cuisinière et la questionna minutieusement.

      – Ils sont sortis, monsieur: la mère d'abord, le curé ensuite. Je ne les aurais pas vus, tant ils marchent doucement, si leurs ombres n'avaient passé sur le carreau de ma cuisine, quand ils ont ouvert la porte… J'ai regardé dans la rue, pour voir; mais ils avaient filé, et raide, je vous en réponds.

      – C'est bien surprenant… Mais où étais-je donc?

      – Je crois que monsieur était au fond du jardin, à voir les raisins de la tonnelle.

      Cela acheva de mettre Mouret d'une exécrable humeur. Il déblatéra contre les prêtres: c'étaient tous des cachotiers; ils étaient dans un tas de manigances, auxquelles le diable ne reconnaîtrait rien; ils affectaient une pruderie ridicule, à ce point que personne n'avait jamais vu un prêtre se débarbouiller. Il finit par se repentir d'avoir loué à cet abbé qu'il ne connaissait pas.

      – C'est ta faute, aussi! dit-il à sa femme, en se levant de table.

      Marthe allait protester, lui rappeler leur discussion de la veille; mais elle leva les yeux, le regarda et ne dit rien. Lui, cependant, ne se décidait pas à sortir, comme il en avait l'habitude. Il allait et venait, de la salle à manger au jardin, furetant, prétendant que tout traînait, que la maison était au pillage; puis, il se fâcha contre Serge et Octave, qui, disaient-ils, étaient partis, une demi-heure trop tôt, pour le collège.

      – Est-ce que papa ne sort pas? demanda Désirée à l'oreille de sa mère.

      Il va bien nous ennuyer, s'il reste.

      Marthe la fit taire. Mouret parla enfin d'une affaire qu'il devait terminer dans la journée. Il n'avait pas un moment, il ne pouvait pas même se reposer un jour chez lui, lorsqu'il en éprouvait


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