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Le fauteuil hanté. Гастон ЛеруЧитать онлайн книгу.

Le fauteuil hanté - Гастон Леру


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petits pas feutrés, il commença le tour des tables qui formaient entre elles comme de petits box, dans lesquels étaient les fauteuils. Il y en avait de célèbres.

      Quand il passait auprès de ceux-là, M. le secrétaire perpétuel y attardait son regard attristé, hochait la tête et murmurait des noms illustres. Ainsi, arriva-t-il devant le portrait du cardinal de Richelieu. Il souleva sa toque.

      –Bonjour, grand homme! fit-il.

      Et il s'arrêta, tourna le dos au grand homme, et contempla, juste en face de lui, un fauteuil.

      C'était un fauteuil comme tous les fauteuils qui étaient là, avec ses quatre pattes et son dossier carré, ni plus ni moins, mais c'était dans ce fauteuil qu'avait coutume d'assister aux séances Mgr d'Abbeville, et nul depuis la mort du prélat ne s'y était assis.

      Pas même ce pauvre Jehan Mortimar pas même ce pauvre Maxime d'Aulnay, qui n'avaient jamais eu l'occasion de franchir le seuil de la salle des séances privées, la salle du Dictionnaire, comme on dit. Or, au royaume des Immortels, il y a vraiment que cette salle-là qui compte, car c'est là que sont les quarante fauteuils, sièges de l'Immortalité.

      Donc, M. le secrétaire perpétuel contemplait le fauteuil de Mgr d'Abbeville.

      Il dit tout haut:—Le Fauteuil hanté!

      Et il haussa les épaules.

      Puis il prononça la phrase fatale, en manière de dérision:

      –Malheur à ceux qui auront voulu s'asseoir avant moi.

      Tout à coup, il s'avança vers le fauteuil jusqu'à le toucher.

      –Eh bien moi, s'écria-t-il en se frappant la poitrine, moi, Hippolyte Patard, qui me moque du mauvais sort et de M. Eliphas de Saint-Elme de Taillebourg de La Nox, moi, je vais m'asseoir sur toi, fauteuil hanté!

      Et, se retournant, il se disposa à s'asseoir…

      Mais à moitié courbé, il s'arrêta dans son geste, se redressa, et dit:

      –Et puis non, je ne m'assoirai pas! C'est trop bête!… On ne doit pas attacher d'importance à des bêtises pareilles.

      Et M. le secrétaire perpétuel regagna sa place après avoir touché, en passant, d'un doigt furtif le manche en bois de son parapluie.

      Sur quoi la porte s'ouvrit et M. le chancelier entra, traînant derrière lui M. le directeur M. le chancelier était un quelconque chancelier comme on en élit un tous les trois mois, mais le directeur de l'Académie de ce trimestre-là était le grand Loustalot, l'un des premiers savants du monde. Il se laissait diriger par le bras comme un aveugle. Ce n'était point qu'il n'y vît pas clair, mais il avait de si illustres distractions, qu'on avait pris le parti, à l'Académie, de ne point le lâcher d'un pas. Il habitait dans la banlieue. Quand il sortait de chez lui pour venir à Paris, un petit garçon, âgé d'une dizaine d'années, l'accompagnait et venait le déposer dans la loge du concierge de l'Institut. Là, M. le chancelier s'en chargeait.

      A l'ordinaire, le grand Loustalot n'entendait rien de ce qui se passait autour de lui, et chacun avait soin de le laisser à ses sublimes cogitations d'où pouvait naître quelque découverte nouvelle destinée à transformer les conditions ordinaires de la vie humaine. Mais ce jour-là, les circonstances étaient si graves que M. le secrétaire perpétuel n'hésita pas à les lui rappeler et peut-être à les lui apprendre. Le grand Loustalot n'avait pas assisté à la séance de la veille; on l'avait envoyé chercher d'urgence chez lui et il était plus que probable qu'il était le seul, à cette heure, dans le monde civilisé, à ignorer encore que Maxime d'Aulnay avait subi le même sort cruel que Jehan Mortimar l'auteur de si Tragiques parfum.

      –Ah! monsieur le directeur! quelle catastrophe! s'écria M. Hippolyte Patard en levant ses mains au ciel.

      –Qu'y a-t-il donc, mon cher ami? daigna demander avec une grande bonhomie le grand Loustalot.

      –Comment! vous ne savez pas! M. le chancelier ne vous a rien dit? C'est donc à moi qu'il revient de vous annoncer une aussi attristante nouvelle! Maxime d'Aulnay est mort!

      –Dieu ait son âme! fit le grand Loustalot qui n'avait rien perdu de la foi de son enfance.

      –Mort comme Jehan Mortimar mort à l'Académie en prononçant son discours!…

      –Eh bien tant mieux! déclara le savant, le plus sérieusement du monde. Voilà une bien belle mort!

      Et il se frotta les mains, innocemment. Et puis, il ajouta:

      –C'est pour cela que vous m'avez dérangé?

      M. le secrétaire perpétuel et M. le chancelier se regardèrent, consternés, et puis s'aperçurent, au regard vague du grand Loustalot, que l'illustre savant pensait déjà à autre chose; ils n'insistèrent pas et le conduisirent à sa place. Ils le firent asseoir lui donnèrent du papier, une plume et un encrier et le quittèrent en ayant l'air de se dire: «Là, maintenant, il va rester tranquille!» Puis, se retirant dans l'embrasure d'une fenêtre, M. le secrétaire perpétuel et M. le chancelier après avoir jeté un coup d'œil satisfait sur la cour déserte, se félicitèrent du stratagème qu'ils avaient employé pour se défaire des journalistes. Ils avaient fait annoncer officiellement, la veille au soir qu'après avoir décidé d'assister en corps aux obsèques de Maxime d'Aulnay, l'Académie ne se réunirait qu'une quinzaine de jours plus tard pour élire le successeur de Mgr d'Abbeville, car on continuait de parler du fauteuil de Mgr d'Abbeville comme si deux votes successifs ne lui avaient pas donné deux nouveaux titulaires.

      Or, on avait trompé la presse. C'était le lendemain même de la mort de Maxime d'Aulnay, le jour par conséquent où nous venons d'accompagner M. Hippolyte Patard dans la salle du Dictionnaire, que l'élection devait avoir lieu. Chaque académicien avait été averti par les soins de M. le secrétaire perpétuel, en particulier et cette séance, aussi exceptionnelle que privée, allait s'ouvrir dans la demi-heure.

      M. le chancelier dit à l'oreille de M. Hippolyte Patard:

      –Et Martin Latouche? Avez-vous de ses nouvelles?

      Disant cela, M. le chancelier considérait M. le secrétaire perpétuel avec une émotion qu'il n'essayait nullement de dissimuler.

      –Je n'en sais rien, répondit évasivement M. Patard.

      –Comment!… vous n'en savez rien?…

      M. le secrétaire perpétuel montra son courrier intact.

      –Je n'ai pas encore ouvert mon courrier!

      –Mais ouvrez-le donc, malheureux!…

      –Vous êtes bien pressé, monsieur le chancelier! fit M. Patard avec une certaine hésitation.

      –Patard, je ne vous comprends pas!…

      –Vous êtes bien pressé d'apprendre que peut-être Martin Latouche, le seul qui ait osé maintenir sa candidature avec Maxime d'Aulnay, sachant du reste à ce moment qu'il ne serait pas élu… vous êtes bien pressé d'apprendre, dis-je, monsieur le chancelier que Martin Latouche, le seul qui nous reste, renonce maintenant à la succession de Mgr d'Abbeville!

      M. le chancelier ouvrit des yeux effarés, mais il serra les mains de M. le secrétaire perpétuel:

      –Oh! Patard! je vous comprends…

      –Tant mieux! monsieur le chancelier! Tant mieux!…

      –Alors… vous n'ouvrirez votre courrier… qu'après…

      –Vous l'avez dit, monsieur le chancelier; il sera toujours temps pour nous d'apprendre, quand il sera élu, que Martin Latouche ne se présente pas!… Ah! c'est qu'ils ne sont pas nombreux, les candidats au Fauteuil hanté!…

      M. Patard avait à peine prononcé ces deux derniers mots qu'il frissonna. Il avait dit, lui, le secrétaire perpétuel, il avait dit, couramment, comme une chose naturelle: «le Fauteuil hanté!…» Il y eut un silence entre les deux hommes. Au-dehors, dans la cour quelques groupes commençaient à se former, mais, tout à leur pensée, M. le secrétaire perpétuel ni le chancelier n'y prenaient garde.

      M.


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