Le Piège Zéro. Джек МарсЧитать онлайн книгу.
périlleuses. En tant que journaliste d’investigation, il avait accompagné les troupes armées dans la Bande de Gaza. Il avait fait des treks dans le désert à la recherche de bases cachées et de caves durant la longue traque pour retrouver Oussama Ben Laden. Il faisait son travail au beau milieu des tirs et des raids aériens. Moins de deux ans auparavant, il avait révélé l’histoire de la contrebande de pièces de drones aux frontières, orchestrée par le Hamas qui avait forcé un ingénieur saoudien à les reconstruire afin de les utiliser pour bombarder. Son reportage avait conduit à un accroissement de la sécurité aux frontières et à se rendre compte que les rebelles recherchaient les meilleures technologies.
Malgré tous les risques qu’il avait pris dans sa vie, il ne s’était jamais autant senti en danger que maintenant. Avec deux collègues israéliens, il couvrait l’histoire de l’Imam Khalil et de sa petite secte de disciples qui avaient libéré un virus muté de la variole dans Barcelone et tenté de faire la même chose aux États-Unis. Une source à Istanbul leur avait révélé que les derniers fidèles de Khalil avaient fui en Irak, se cachant quelque part près d’Albaghdadi.
Mais Yosef Bachar et ses deux compatriotes n’avaient pas trouvé les disciples de Khalil. Ils n’avaient même pas encore atteint la ville quand leur voiture avait été forcée de s’arrêter par un autre groupe et que les trois journalistes avaient été pris en otage.
Ils étaient dans le sous-sol d’une base dans le désert depuis trois jours, attachés aux poignets et gardés dans le noir, au sens propre comme au sens figuré.
Bachar avait passé ces trois jours à attendre leur inévitable destin. Ces types étaient certainement du Hamas, s’était-il dit, ou d’une de ses branches. Ils allaient le torturer et finir par le tuer. Ils allaient filmer la scène et envoyer la vidéo au gouvernement israélien. Pendant ces trois jours à attendre et à se poser des questions, Bachar avait imaginé des dizaines de scénarios horribles qui le torturaient tout autant que ce que ces hommes avaient prévu de leur faire.
Pourtant, quand quelqu’un vint les trouver, ce ne fut pas avec des armes ou des instruments de torture, mais avec des mots.
Un jeune homme qui semblait ne même pas avoir vingt-cinq ans entra seul dans le sous-sol de la base et alluma la lumière : une seule ampoule nue au plafond. Il avait les yeux noirs, une barbe coupée court et des épaules larges. Le jeune homme se mit à marcher devant eux trois, à genoux avec les poignets liés devant eux.
“Je m’appelle Awad Ben Saddam,” leur dit-il, “et je suis le chef de la Confrérie. Vous avez été appelés tous les trois vers un plus glorieux destin. Parmi vous, l’un va délivrer un message pour moi. Un autre va faire un reportage sur notre jihad sacré. Et le troisième… le troisième est inutile. Le troisième périra de nos mains.” Le jeune homme, ce Ben Saddam, s’arrêta de marcher et fouilla dans sa poche.
“Si vous le souhaitez, vous pouvez déterminer entre vous quel sera le rôle de chacun,” dit-il. “Sinon, vous pouvez laisser le hasard en décider.” Il se pencha et posa trois morceaux de ficelle au sol, devant eux.
Deux d’entre eux mesuraient environ quinze centimètres de long. Le troisième avait été coupé un peu plus court que les deux autres.
“Je reviendrai dans une demi-heure.” Le jeune terroriste quitta le sous-sol et referma la porte à clé derrière lui.
Les trois journalistes fixèrent les trois morceaux de corde coupée sur le sol de pierre.
“C’est monstrueux,” prononça Avi à voix basse. C’était un solide gaillard de quarante-huit ans, plus vieux que la plupart de ceux qui travaillaient encore sur le terrain.
“Je suis volontaire,” leur dit Yosef. Les mots s’étaient échappés de sa bouche avant même qu’il réfléchisse… sans quoi il aurait certainement tenu sa langue.
“Non, Yosef.” Idan, le plus jeune d’entre eux, secoua fermement la tête. “C’est très noble de ta part, mais nous ne pourrons pas supporter de vivre en sachant que nous t’avons laissé te porter volontaire pour mourir.”
“Tu vas laisser le hasard décider, alors ?” rétorqua Yosef.
“Le hasard est juste,” dit Avi. “Le hasard n’est pas biaisé. De plus…” Il baissa d’un ton en ajoutant, “C’est peut-être une ruse. Ils vont peut-être tous nous tuer dans tous les cas.”
Idan avança ses deux mains liées et attrapa les trois bouts de corde dans son poing, les saisissant afin que chaque extrémité visible ait l’air de mesurer la même longueur. “Yosef,” dit-il, “tu choisis en premier.” Il avança le poing vers lui.
La gorge de Yosef était trop sèche pour qu’il puisse répondre. Il tendit les mains, attrapa le bout d’une corde et tira lentement dessus. Il récita une prière dans sa tête tandis qu’un, puis deux, puis trois centimètres se déroulaient entre ses doigts.
Il finit par libérer l’autre bout de la corde après quelques centimètres de plus. Il avait tiré la plus courte.
Avi poussa un soupir, mais c’était de tristesse et non de soulagement.
“Et voilà,” se contenta de dire Yosef.
“Yosef…” commença Idan.
“Vous pouvez décider entre vous quelle tâche vous allez accomplir,” dit Yosef en coupant la parole au jeune homme. “Mais… si l’un d’entre vous s’en sort et parvient à rentrer chez lui, s’il vous plaît, dites à ma femme et à mon fils que…” Il s’interrompit. Les derniers mots semblaient lui manquer. Il n’y avait aucun message à transmettre qu’ils ne sachent déjà.
“Nous leur dirons que tu as accepté ton destin avec courage face à la terreur et à l’injustice,” proposa Avi.
“Merci.” Yosef lâcha le bout de corde au sol.
Ben Saddam revint quelques instants plus tard, comme il l’avait promis, et se remit à marcher devant eux. “Je suppose que vous avez pris une décision ?” demanda-t-il.
“En effet,” dit Avi, regardant le terroriste dans les yeux. “Nous avons décidé d’adopter votre concept islamique de l’enfer afin de croire qu’il y a un endroit où vous finirez avec votre bande de bâtards.”
Awad Ben Saddam sourit. “Mais lequel d’entre vous s’en ira dans cet endroit avant moi ?”
La gorge de Yosef était toujours trop sèche pour pouvoir parler. Il ouvrit la bouche pour accepter son destin.
“C’est moi.”
“Idan !” Yosef écarquilla les yeux. Avant qu’il n’ait eu le temps de prononcer quoi que ce soit, le jeune homme avait parlé. “Non, ce n’est pas lui,” se hâta-t-il de dire à Ben Saddam. “J’ai tiré la corde la plus courte.”
Le regard de Ben Saddam passa de Yosef à Idan, visiblement amusé. “Je suppose que je vais devoir tuer celui qui a ouvert la bouche en premier.” Il mit la main à sa ceinture et dégaina un affreux couteau à lame incurvée avec un manche en corne de chèvre.
Sa seule vue suffit à retourner l’estomac de Yosef. “Attendez, pas lui…”
Awad décrivit un arc avec son couteau et trancha la gorge d’Avi. La bouche de l’homme s’ouvrit de surprise, mais aucun son ne sortit pendant qu’une cascade de sang s’échappait de son cou ouvert et souillait le sol.
“Non !” cria Yosef. Idan ferma les yeux et laissa échapper un sanglot.
Avi tomba en avant sur le ventre, le visage sur le côté, tandis qu’une mare de sang sombre s’infiltrait dans la pierre.
Sans prononcer un mot de plus, Ben Saddam les laissa là une fois de plus.
Restés seuls, ils endurèrent tous deux cette nuit sans sommeil et ne s’adressèrent aucune parole, même si Yosef pouvait entendre les légers sanglots d’Idan