Le Fils des Dragons. Морган РайсЧитать онлайн книгу.
lui jeta un regard furieux. "Vraiment ? Vous souhaitez peut-être demander leur avis aux paysans qui travaillent votre terre ?"
L'homme fut pris au dépourvu. "Votre Altesse, les nobles ne sont pas des paysans. Notre position vis-à-vis de vous n'est pas la même que la leur par rapport à nous."
"On s'adresse à un roi en lui donnant du votre majesté," lui répondit Vars.
"Mais vous êtes le régent, Votre Altesse," rétorqua un autre noble, que Vars reconnut comme étant le Marquis d'Underlands. "Nous devons respecter toute décision prise à cet égard, mais il est également vrai que vous n'êtes que second dans l'ordre d'accession au trône. Aucune décision définitive n'a encore été prise."
"Une décision définitive à quel sujet ?" tempêta Vars, sentant la situation lui échapper.
"Quant à savoir si vous serez roi," répondit le marquis.
Vars aurait voulu décapiter cet homme pour son affront, l'étrangler à mains nues. Sauf que… le marquis était un homme grand, Vars sentit la peur le terrasser, le pétrifier, l'empêchant de faire ce qu'il voulait désespérément faire.
"De tels propos frisent la trahison, mon seigneur," dit une voix dans son dos. Vars poussa un soupir de soulagement en reconnaissant Finnal, qui se frayait un chemin parmi la foule. "Mon père ne validerait certainement pas."
L'homme recula légèrement. "Ce n'était pas dans mes intentions. Simplement que les rôles traditionnels de la noblesse doivent…"
"Le rôle traditionnel de la noblesse est de soutenir le roi," déclara Finnal en esquissant un geste en direction de Vars. "Poursuivez, je vous prie, Majesté."
Vars reprenait confiance, rasséréné par le soutien de Finnal.
"D'après nos informations, les hommes du Roi Ravin attaquent via l'Ile de Leveros," déclara Vars. "Ma propre sœur a pris des risques pour nous apporter cette information."
Erin considérait désormais sa sœur qui avait agi de façon utile. Elle redeviendrait bientôt sa demi-sœur.
"Nous en sommes conscients," affirma le Commandant Harr. "La question est de savoir quoi faire pour les contrer. Les implications militaires sont complexes, et—”
"La situation militaire est simple," décréta Vars. "Notre ennemi ignore que nous possédons ces informations. Nous savons qu'ils attaquent au nord. Ils pensent que nous sommes encore sous le choc de l'attaque des ponts du sud. Nous irons par conséquent à leur rencontre."
"Qu'est-ce à dire ?" demanda le Commandant Harr. Le vieil homme avait une manière bien à lui de poser des questions à Vars, qui lui donnait l'impression d'un ignare. "Quelles troupes devons-nous envoyer, lesquelles laisser derrière nous ?"
"Mais enfin Commandant. Nous enverrons vos chevaliers."
"Tous ?" s'exclama le représentant de la Maison des Armes. "Royalsport resterait sans défense ?"
"Les gardes resteront ici, évidemment," poursuivit Vars. "Ainsi que les escortes privées de mes fidèles nobles." Il les regarda tous afin de s'assurer de leur loyauté. "Mais les Chevaliers d'Argent iront vers le nord pour affronter la menace, avec autant de soldats possibles en mesure de se déplacer rapidement. Nous les attaquerons dès qu'ils débarqueront, et les prendrons par surprise."
Le génie de ce plan résidait dans sa simplicité et sa rapidité. Cela signifiait également que les combats se dérouleraient loin de la capitale. Vars s'attribuerait le mérite de la victoire, sans jamais approcher du combat. Le plan idéal.
"Je ne pense pas—” commença le Commandant Harr, mais Vars l’interrompit.
"Nous sommes en position de force. Notre ennemi croit nous avoir bernés, peut semer la désolation dans le nord du royaume à sa guise. Cette situation ne durera pas. Il s'attend à ce que des messagers se dirigent vers le sud après son arrivée. Nous devons agir dès à présent. Nous devons tout mettre en œuvre pour en finir. La tête du Roi Ravin finira sur une lance, nous lui montrerons que le Royaume du Sud ne peut nous atteindre, ne peut enlever ma sœur, tuer mon frère, assassiner mon père !"
Vars n'en avait cure mais si ses courtisans s'en souciaient, alors il les utiliserait pour parvenir à ses fins.
Les discussions reprirent bon train. Ils auraient dû applaudir son plan, chanter ses louanges, mais se mirent à échanger. Tous parlaient en même temps, Vars ne distinguait que des bribes de conversation.
"Les précédents historiques sont inquiétants…" déclara le chef des lettrés.
"Nous allons assumer le fardeau d'une telle décision," rétorqua un comte.
"…sans parler des conséquences selon les terres traversées," dit un des chevaliers, comme si un simple chevalier avait son mot à dire.
Même la patronne de la Maison des Soupirs semblait vouloir ajouter son grain de sel, elle chuchotait à ses voisins des paroles que Vars ne pouvait entendre. À son grand étonnement, certains d'entre eux acquiescèrent, comme si la femme de cette Maison-là était plus au fait de la guerre que le régent.
"…devrions attendre les ordres du Roi Godwin à son réveil," dit un noble, Vars sentit sa rage gronder.
Finnal s'interposa une fois de plus, mains levées. "Mes seigneurs, mesdames. Nous avons eu de nombreuses occasions d'en discuter, mais le temps est venu d'agir. Le régent a pris une décision pour le bien du pays, à nous d'agir. Je le dis maintenant, en tant que membre de sa famille et en tant qu'ami, le Régent Vars tient notre sécurité à cœur. Nous devons agir ; nous attaquerons les troupes du Roi Ravin au nord sur le champ !"
La foule l'acclama, Vars lui en sut gré, d'autant plus lorsqu'il vit que les chevaliers se mettaient en branle parmi la foule, se dirigeaient vers la cour pour rassembler des provisions. Il éprouva une vive satisfaction à l'idée que les gens lui obéissent, même s'il avait fallu que Finnal s'en mêle.
Mais en même temps, il était en colère. En colère qu’on ait osé le défier, l'ait remis en question, l'ait regardé de haut, il n'avait de régent que le titre. Une situation qu'il ne pouvait pas se permettre de supporter, une situation qu'il ne supporterait pas.
Il devait agir.
CHAPITRE NEUF
Le Roi Ravin se tenait à la proue de son vaisseau amiral, son armure étincelait, un vrai héros, sa couronne posée sur ses boucles brunes, la main sur la garde de son épée, veillant à avoir l'air d'un roi guerrier, tandis que son armada se rapprochait de la côte d'Astare.
Il ressentit une vive satisfaction. Il éprouvait toujours une certaine joie sachant que les choses se passaient toujours comme prévu, qu'il s'agisse de chasser une proie, séduire une femme ou conquérir un royaume.
Il avait éprouvé la même satisfaction en s’emparant du trône de son père voilà bien des années, il l'avait ressenti avec chaque groupe de mercenaires infiltré dans le Royaume du Nord sur ses ordres, chaque espion qui rapportait de plus amples informations sur le territoire, les villages, les marchandises. Il avait planifié chaque détail de la future conquête qui se déroulait maintenant exactement selon ses plans.
Il savait que ses hommes le surveilleraient, attendraient ses ordres. Déjà, une douzaine de ses navires attaquaient la cité, le reste attendait, sous son autorité. Pas un homme n'aurait osé agir sans son commandement, et pas seulement parce qu'ils savaient tous qu'agir sonnerait leur mort ou celle de leurs familles. Tous les hommes présents savaient qu'ils n'étaient qu'un maillon de la chaîne, que seul leur roi maîtrisait le plan dans son ensemble.
Tout était pour le mieux. Un roi qui confie ses plans ne demeure pas roi longtemps. Il n'y avait qu'à voir son idiot de père, qui avait confié à Ravin la moindre de ses pensées, la moindre réflexion. Sa mort avait facilité l'unification du royaume.
"Alors ?" dit Ravin en se tournant vers le pont du navire. Les commandants attendaient, un de la flotte, un des soldats et un troisième vêtu de l'habit ordinaire des mercenaires.