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Persuasion. Jane AustenЧитать онлайн книгу.

Persuasion - Jane Austen


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je commençais à croire que vous ne viendriez pas. Je suis si malade que je puis à peine parler. Je n'ai pas vu depuis le matin une créature vivante.

      —Je suis fâchée de vous trouver souffrante, répondit Anna, vous m'aviez donné jeudi de bonnes nouvelles de votre santé.

      —Oui, je parais toujours mieux portante que je ne suis. Depuis quelque temps, je suis loin d'aller bien. Je ne crois pas, dans toute ma vie, avoir été si souffrante que ce matin. J'aurais pu me trouver mal, et personne pour me soigner. Ainsi lady Russel n'a pas voulu entrer? je ne crois pas qu'elle soit venue ici trois fois cet été.»

      Anna s'étant informée de son beau-frère, Marie lui répondit:

      «Charles est à la chasse; je ne l'ai pas aperçu depuis sept heures du matin. Il a voulu partir, quoiqu'il ait vu combien j'étais souffrante; il disait ne pas rester longtemps, mais il est une heure, et il n'est pas rentré. Je n'ai pas vu une âme pendant toute cette longue matinée.

      —Vous avez eu vos petits garçons avec vous?

      —Oui, tant que j'ai pu supporter leur bruit; mais ils sont si indisciplinés qu'ils me font plus de mal que de bien. Le petit Charles ne m'écoute pas, et Walter devient aussi méchant que lui.

      —Vous allez bientôt vous trouver mieux, dit gaiement Anna. Vous savez que je vous guéris toujours. Comment se portent vos voisins de Great-House?

      —Je n'en sais rien, je ne les ai pas vus aujourd'hui, excepté M. Musgrove, qui s'est arrêté et m'a parlé à la fenêtre, mais sans descendre de cheval, quoique je lui aie dit combien j'étais souffrante. Personne n'est venu près de moi. Cela ne convenait pas aux misses Musgrove; sans doute elles n'aiment pas à se déranger.

      —Elles peuvent encore venir, il est de bonne heure.

      —Je n'ai pas besoin d'elles; elles parlent et rient beaucoup trop pour moi. Je suis très malade, Anna. C'était peu aimable à vous de ne pas venir jeudi.

      —Ma chère Marie, rappelez-vous les bonnes nouvelles que vous m'avez données de votre santé. Le ton de votre lettre était gai, et vous disiez que rien ne pressait pour mon arrivée; et puis mon désir était de rester avec lady Russel jusqu'à la fin. J'ai été si occupée que je ne pouvais quitter Kellynch plus tôt.

      —Mon Dieu! qu'avez-vous eu à faire?

      —Beaucoup de choses: je ne puis tout me rappeler. J'ai fait une copie du catalogue des livres et tableaux de mon père. J'ai été souvent au jardin avec Mackensie, tâchant de lui faire comprendre quelles sont les plantes d'Élisabeth destinées à lady Russel. J'ai eu mes livres, ma musique à arranger, et à refaire toutes mes malles, pour n'avoir pas compris d'abord ce qu'il fallait emporter. Enfin, j'ai été visiter toutes les maisons de la paroisse. Tout cela prend beaucoup de temps.

      —Ah! mais vous ne me parlez pas de notre dîner chez les Pools, hier?

      —Vous y êtes donc allée? Je croyais que vous aviez dû y renoncer?

      —Oh! j'y suis allée! Je me portais très bien hier. Jusqu'à ce matin je n'étais pas malade; n'y pas aller aurait semblé singulier.

      —J'en suis très contente: j'espère que vous vous êtes amusée?

      —Pas trop. On sait d'avance le dîner et les personnes qui y seront. Quel ennui de n'avoir pas une voiture à soi! M. et Mme Musgrove m'ont emmenée, et nous étions trop serrés. Ils sont si gros, et occupent tant de place! J'étais entassée au fond avec Henriette et Louisa. Voilà très probablement la cause de mon malaise.»

      La patience et la bonne humeur d'Anna apportèrent bientôt un soulagement à Marie, qui put s'asseoir, et espéra pouvoir se lever pour dîner. Puis, oubliant qu'elle était malade, elle alla à l'autre bout de la chambre, arrangea des fleurs, mangea quelque chose et se trouva assez bien pour proposer une petite promenade.

      «Où allons-nous? dit-elle: sans doute vous n'irez pas à Great-House avant qu'on vous ait fait visite?

      —Mais si, dit Anna; je ne suis pas sur l'étiquette avec les dames Musgrove.

      —Oh! c'est à elles de venir, elles doivent savoir ce qui est dû à ma sœur. Cependant nous pouvons y entrer avant de faire notre promenade.»

      Anna avait toujours trouvé très fâcheuse cette façon de comprendre les relations; mais, croyant qu'on avait à se plaindre de part et d'autre, elle avait cessé de s'en occuper. Elles allèrent à Great-House. On les introduisit dans un antique parloir carré, au parquet brillant et orné d'un maigre tapis. Mais les filles de la maison donnaient à cette pièce l'air de désordre indispensable, avec un grand piano à queue, une harpe, des jardinières, et de petites tables dans tous les coins. Oh! si les originaux des portraits accrochés à la boiserie, si les gentilshommes habillés de velours brun, et les dames, en satin bleu, avaient vu ce bouleversement de l'ordre et de la propreté! Les portraits eux-mêmes semblaient saisis d'étonnement!

      Les Musgrove, comme leur maison, représentaient deux époques. Les parents étaient dans le vieux style anglais, les enfants, dans le nouveau. M. et Mme Musgrove étaient de très bonnes gens, affectueux et hospitaliers, sans grande éducation et sans aucune élégance. Leurs enfants avaient un esprit et des façons plus modernes. La famille était nombreuse, mais c'étaient encore des enfants, excepté Charles, Louisa et Henriette, jeunes filles de dix-neuf et vingt ans, qui avaient rapporté à la maison le bagage ordinaire des talents de pension, et n'avaient, comme mille autres jeunes filles, rien à faire que d'être gaies, heureuses, et suivre les modes. Leurs vêtements étaient parfaits, leurs figures assez jolies, leur esprit extrêmement bon, et leurs manières simples et agréables. Elles étaient très appréciées à la maison, et très recherchées au dehors. Anna les trouvait fort heureuses; mais cependant, soutenue, comme nous le sommes tous, par le sentiment de sa supériorité, elle n'aurait pas voulu changer contre toutes leurs jouissances son esprit cultivé et élégant.

      Elle n'enviait que la bonne intelligence qui semblait régner entre elles, et cette mutuelle affection qu'elle-même avait si peu connue. Elles furent reçues très cordialement, et Anna ne trouva rien à critiquer. La demi-heure s'écoula en causerie agréable, et Anna ne fut pas peu surprise de voir les misses Musgrove les accompagner à la promenade sur l'invitation pressante de Marie.

       Table des matières

      Anna n'avait pas besoin de cette visite pour savoir qu'un changement de société amène un changement total de conversation, d'opinions et d'idées. Elle aurait voulu que les Elliot pussent voir combien leurs affaires, traitées avec une telle solennité à Kellynch, avaient ici peu d'importance. Cependant elle sentit qu'elle avait encore besoin d'une leçon, car elle avait compté sur plus de curiosité et de sympathie qu'elle n'en trouva. On lui avait bien dit: «Ainsi, miss Anna, votre père et votre sœur sont partis?» Ou bien: «J'espère que nous irons aussi à Bath cet hiver; mais nous comptons loger dans un beau quartier.» Ou bien, Marie disait: «En vérité! comme je m'amuserai seule ici pendant que vous serez à Bath!»

      Anna se promettait de ne plus éprouver à l'avenir de telles déceptions, et pensait avec reconnaissance au bonheur inexprimable d'avoir une amie vraie et sympathique comme lady Russel.

      Cependant elle trouvait très juste que chaque société dictât ses sujets de conversation. Les messieurs Musgrove avaient leur chasse, leurs chevaux, leurs chiens, leurs journaux. Les dames avaient les soins d'intérieur, la toilette, les voisins, la danse et la musique. Anna, devant passer deux mois à Uppercross, devait meubler son imagination et sa mémoire avec les choses d'Uppercross. Elle ne redoutait pas ces deux mois. Marie était abordable et accessible à son influence. Anna était sur un pied de bonne amitié avec son beau-frère; les enfants l'aimaient presque autant et la respectaient plus que leur mère. Ils étaient pour elle une source d'intérêt, d'amusement et d'occupation.

      Charles


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