Au soleil de juillet (1829-1830). Paul AdamЧитать онлайн книгу.
les occasions sublimes. Alors, je renonçai, las de cet homme sans principes et sans boussole... Hélas! j'allais obéir deux ans à ce faquin de Berthier, à ce singe en uniforme, qui dormait dans ses bottes et dans ses chamarrures, prêt à paraître sous la grande livrée au moindre appel de son maître. Hélas!... avec ça l'esprit d'un niais! Si la division polonaise que j'ai conduite en Russie, comme colonel d'état-major, fut détruite, dès décembre 1812, si je reçus un biscaïen dans la cuisse, dont je souffre rudement quand la température est humide, si je fus traîné captif dans les casernes de Saint-Pétersbourg, je le dois à un ordre incompréhensible à force de paraître clair et point embarrassé de détails superflus... Ah! il était bien incapable d'ajouter quoi que ce fût aux paroles de son maître, le pauvre homme! Et Napoléon a contresigné une pareille dépêche! Mais oui! C'est ça qui m'a décidé à redevenir chouan. J'ai repris les illusions de ma jeunesse. Ces goujats m'avaient lassé. Fichue bêtise, au reste, que je fis là... Car en fait d'ignorance et d'iniquité les Bourbons en remontrèrent à Buonaparte lui-même, sur mon dos..., sur mon dos..., je puis bien le dire.
Il hochait a plusieurs reprises sa tête aquiline, il clignait de l'œil dans les sourcils touffus. S'il ricanait, il se mettait debout, arpentait la galerie, le long des murs en miroirs créant des perspectives factices et mystérieuses de palais antiques avec la disposition des colonnes plates, reflétées indéfiniment. Il se passait les mains dans ce qui lui demeurait de cheveux blonds et blancs autour de l'occiput nu. Il s'agitait de mille manières pendant que le capitaine Lyrisse défendait Napoléon, les Maréchaux, brandissait sa pipe, et, parfois, bondissait de son fauteuil courbe, pour joindre à son éloquence toute la mimique de son corps nerveux.
Entre eux, Omer s'amusait, silencieux, surpris de ne pas frémir à leurs enthousiasmes. Plusieurs fois, il les vit se provoquer ainsi que pour le duel. Ils étaient au point de se couper furieusement la gorge, en l'honneur des qualités politiques attribuées par l'un à Murat ou bien à Victor, décriées par l'autre. Déniant au génie de Napoléon les triomphes, Dubourg trouvait dans le jeune avocat un approbateur. Et de cela, l'oncle Edme enrageait.
—Tu as le même esprit que ton père: tu refuses, par un misérable orgueil, de t'incliner devant le soleil!
—Buonaparte n'était qu'un rayon. Il n'était pas le soleil, s'écriait Dubourg. Le soleil c'était l'esprit de la République et de la Liberté!... Voilà!...
Et il se campait, les poings aux hanches...
Le capitaine Lyrisse se battait les flancs, levait les poings aux verreries du lustre. Bientôt les deux contradicteurs se réconciliaient en injuriant les Bourbons.
Amis, ils l'étaient autant que ceux de la fable. Sans doute, à cause de la différence entre les grades, le capitaine laissait au général-comte toutes les initiatives, sauf en matière de discussion politique et stratégique. Dubourg continuait à vivre en maître dans son hôtel vendu. Lui-même inspectait, à l'écurie, le poil des chevaux, grondait les domestiques tout le jour, ordonnait qu'on nettoyât mieux les pierres humides de la cour, et qu'on se privât de cuire l'odeur des oignons dans la cuisine. Il grommelait si quelqu'un des meubles se trouvait hors de la place coutumière. Il entrait partout sans cogner aux portes, fermait les persiennes, tirait les rideaux, bousculait les livres d'Omer dans la bibliothèque, s'oubliait dans un sofa, tout seul au milieu d'une pièce, et baillait là, des heures, une brochure sur les genoux. Il détestait le silence, adorait la conversation. Il se précipitait sur Omer pour lui souhaiter le bonjour et en déduire la commodité de dire une anecdote personnelle. Aussitôt il avouait son importance durant la première Restauration. En effet, quand les illuminés du Tugend Bund se furent avisés de contraindre Alexandre à rappeler d'Amérique Moreau, dans l'intention d'opposer à l'autocratisme de Buonaparte l'ancien prestige du général révolutionnaire, celui-ci reçut les conseils de Bernadotte, en débarquant sur la côte suédoise. Il avait donc voulu enrôler Dubourg dans son état-major. Le comte eut consenti à condition d'arborer la cocarde blanche. Ce serin de Moreau croyait déjà succéder à son rival, et gouverner avec le secours des républicains accourus dans ses bras, comme au temps de Hohenlinden. L'imbécile, ne voulut pas de la cocarde blanche. Le général-comte déclina l'honneur de manquer, avec ce fat, sa fortune. Elle parut prendre forme quand Louis XVIII l'eut nommé chef d'état-major, l'année suivante, au ministère de la Guerre. Pendant les Cent Jours il avait suivi le roi en Belgique et rédigé avec «ce dindon de Châteaubriand», le Journal politique de Gand. Après Waterloo, il avait battu les fédérés, les corps francs, rétabli l'autorité des Bourbons dans Arras, et reçu en récompense, le gouvernement de l'Artois. Mal habile à persécuter ses amis de l'empire, philadelphes, bonapartistes et jacobins il avait été brutalement destitué, sur les réclamations en haut lieu, des ultras. Cette injustice l'avait rejeté dans les rangs des républicains. Il préconisait même les thèses les plus avancées de la Révolution, louait Babeuf et Buonarotti dont il recommandait au jeune avocat les thèses. Il le poursuivait en prêchant le communisme et la terreur.
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