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Le renard. Johann Wolfgang von GoetheЧитать онлайн книгу.

Le renard - Johann Wolfgang von Goethe


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Mon cher oncle, soyez le bienvenu à toute heure! En attendant, que le blâme retombe sur ceux qui vous ont commandé ce voyage; car il est long et périlleux! Ô ciel! comme vous êtes échauffé! vos poils sont couverts de sueur, et vous respirez à peine. Est-ce que le roi n'avait pas d'autre messager que le plus noble de ses seigneurs, celui dont il fait le plus de cas? Mais il devait sans doute en être ainsi pour mon plus grand bien; je vous en prie, protégez-moi à la cour, où l'on m'a tant calomnié. Mon intention était de m'y rendre librement demain, malgré le mauvais état de ma santé, et c'est encore mon projet; aujourd'hui, je suis trop mal pour me mettre en voyage. J'ai eu le malheur de trop manger d'un aliment qui ne convient guère; car il me donne de terribles coliques. – Qu'est-ce donc? lui demanda Brun. L'autre reprit: «À quoi bon vous le raconter? La vie n'est pas facile ici; mais je prends mon mal en patience; ce n'est pas tous les jours fête! et, quand il n'y a rien de mieux pour moi et les miens, ma foi, nous mangeons des rayons de miel, il y en a toujours tant qu'on en veut. Mais je n'en mange que par nécessité; me voilà maintenant tout enflé, et ce n'est pas étonnant! j'ai avalé cette drogue-là à contre-cœur. Si je puis jamais m'en passer, du diable si j'en mange encore! – Eh! qu'ai-je entendu, mon neveu? reprit l'ours; faites-vous donc ainsi fi du miel que tant d'autres recherchent? Le miel, faut-il vous le dire? est le meilleur des aliments, du moins pour moi. Vous n'avez qu'à m'en donner, vous ne vous en repentirez pas! je serai encore plus à votre service. – Vous plaisantez, dit l'autre. – Non, vraiment, répond l'ours, je parle très-sérieusement. – S'il en est ainsi, reprend le renard, il m'est facile de vous être agréable; car le paysan Rustevyl demeure au bas de la montagne, c'est chez lui qu'il y a du miel! Certes, vous et toute votre famille n'en avez jamais vu autant à la fois.» Brun se sentait dévoré d'une ardente convoitise pour ce mets chéri. «Oh! conduisez-moi bien vite là , mon cher neveu! s'écria-t-il, je ne l'oublierai jamais. Procurez-moi du miel, quand même je n'en mangerais pas tout mon soûl. – Allons, dit le renard, ce n'est pas le miel qui manquera. J'ai peine à marcher aujourd'hui, il est vrai; mais l'amour que j'ai toujours eu pour vous m'adoucira le chemin. Car je ne connais personne de tous mes parents pour qui j'aie eu de tout temps autant de vénération! Mais venez! en revanche, vous m'aiderez à la cour à confondre mes puissants ennemis et mes accusateurs. Quant à aujourd'hui, je m'en vais vous rassasier de miel autant que vous en pourrez porter.» Le rusé coquin faisait allusion aux coups que l'ours allait recevoir des paysans furieux.

      Reineke prit les devants et Brun suivit aveuglément. «Si je réussis, pensait le renard, je te vois mener aujourd'hui même à la foire, où tu mangeras un miel un peu amer.» Ils arrivèrent à la cour de Rustevyl; l'ours se réjouit, mais bien à tort, comme tous les fous qui se laissent duper par l'espérance.

      Le soir était arrivé et Reineke savait qu'ordinairement à cette heure Rustevyl était couché dans sa chambre; il était charpentier de son état et fort habile homme. Il y avait dans sa cour un tronc de chêne étendu par terre; pour le fendre, il avait déjà fait entrer deux coins solides dans le bois, et l'arbre entamé bâillait à une de ses extrémités presque la longueur d'une aune. Reineke l'avait bien remarqué; il dit à l'ours: «Mon oncle, il y a dans cet arbre bien plus de miel que vous ne supposez; fourrez-y votre museau aussi profondément que vous pourrez. Je vous conseille seulement de ne pas y mettre trop de voracité, vous pourriez vous en trouver mal. – Croyez-vous, dit l'ours, que je sois un glouton? Fi donc! il faut de la modération en toute chose.» C'est ainsi que l'ours se laissa enjôler; il fourra dans la fente sa tête jusqu'aux oreilles et même les pattes de devant.

      Reineke se mit aussitôt à l'œuvre, et, à force de tirer et de pousser, il fit sortir les coins, et voilà Brun pris, la tête et les pieds comme dans un étau, malgré ses cris et ses prières. Quelles que fussent sa force et sa hardiesse, Brun fut à une rude épreuve et c'est ainsi que le neveu emprisonna son oncle par ses ruses. L'ours hurlait, beuglait, et avec ses pattes de derrière grattait la terre en fureur et fit en somme un tel tapage, que Rustevyl se releva. Le maître charpentier prit sa hache à tout hasard afin d'être armé dans le cas où l'on chercherait à lui nuire.

      Cependant Brun se trouvait dans de terribles angoisses; le chêne l'étreignait plus fortement. Il avait beau s'agiter en hurlant de douleur, il n'y gagnait rien; il croyait n'en sortir jamais; c'est ce que pensait aussi Reineke et il s'en réjouissait. Lorsqu'il vit de loin s'avancer Rustevyl, il se mit à crier: «Brun, comment cela va-t-il? Modérez-vous à l'endroit du miel; dites-moi, le trouvez-vous bon? Voilà Rustevyl qui arrive et qui va vous offrir l'hospitalité; vous venez de dîner, il vous apporte le dessert: bon appétit!» Et Reineke s'en retourna à son château de Malpertuis. Lorsque Rustevyl arriva et vit l'ours, il courut bien vite appeler les paysans qui étaient encore réunis au cabaret. «Venez! leur cria-t-il; il y a un ours de pris dans ma cour, c'est la pure vérité!» Ils suivirent en courant; chacun fit diligence autant qu'il put. L'un prit une fourche, l'autre un râteau, le troisième une broche, le quatrième une pioche, et le cinquième était armé d'un pieu. Jusqu'au curé et au sacristain qui arrivèrent avec leur batterie de cuisine. La cuisinière du curé (elle s'appelait madame Yutt et savait préparer le gruau mieux que personne) ne resta pas en arrière, elle vint avec sa quenouille pour faire un mauvais parti au malheureux ours. Brun entendait, dans une détresse affreuse, le bruit croissant de ses ennemis qui approchaient. D'un effort désespéré, il arracha sa tête de la fente; mais il y laissa sa peau et ses poils jusqu'aux oreilles. Non, jamais, on n'a vu un animal plus à plaindre! le sang lui jaillit des oreilles. À quoi cela lui sert-il d'avoir délivré sa tête? ses pattes restent encore dans l'arbre; il les arrache vivement d'une secousse; il tombe sans connaissance: les griffes et la peau des pattes étaient restées dans l'étau de chêne. Hélas! cela ne ressemblait guère au doux miel dont Reineke lui avait donné l'espoir; le voyage ne lui avait guère réussi; c'était une triste expédition! Pour comble de malheur, sa barbe et ses pieds sont couverts de sang; il ne peut ni marcher, ni courir; et Rustevyl approche! Tous ceux qui sont venus avec lui tombent sur l'ours; ils ne songent qu'à le tuer. Le curé le frappe de loin avec un bâton très-long. La pauvre bête a beau se tourner à droite ou à gauche, ses ennemis le pressent, les uns avec des épieux, les autres avec des haches; le forgeron a apporté des marteaux et des tenailles; d'autres viennent avec des bêches et des hoyaux; ils frappent, ils crient, ils frappent jusqu'à ce que l'ours roule de frayeur et de détresse dans sa propre ordure. Ils tombèrent tous dessus; nul ne resta en arrière. Le bancal Schloppe et Ludolf le canard furent les plus enragés; Gérold maniait le fléau avec ses doigts crochus; à ses côtés se tenait le gros Kuckelrei. Ce furent les deux qui frappèrent le plus. Abel Quack et madame Yutt aussi s'en donnèrent à cœur joie; Talké frappa l'ours avec sa botte. Il n'y eut pas que ceux que nous venons de nommer; car, hommes et femmes, tous y coururent: chacun en voulait à la vie de Brun. Kuckelrei poussait les plus hauts cris, il faisait l'important; car madame Villigétrude, qui demeure près de la porte, était sa mère (on le savait); quant à son père, il était inconnu. Pourtant les paysans croyaient que ce pouvait bien être Sander le Noir, le moissonneur, un fier compagnon (quand il était seul). Il y eut aussi maintes pierres jetées qui assaillirent de tous côtés l'infortuné Brun. Enfin, le frère de Rustevyl s'avança et asséna sur la tête de l'ours un si bon coup de bâton, qu'il en fut tout étourdi; pourtant la violence du coup le fit lever. Éperdu, il se précipita au milieu des femmes, qui se culbutèrent l'une sur l'autre, en criant. Quelques-unes même tombèrent dans la rivière: l'eau était profonde. Le curé se mit à crier: «Regardez! voilà madame Yutt la cuisinière qui disparaît là – bas avec sa pelisse, et sa quenouille est ici! Au secours, mes braves gens! je promets deux tonneaux de vin et indulgence plénière pour récompense à qui la sauvera.» Tous, croyant l'ours mort, se précipitèrent dans l'eau pour sauver les femmes; on en retira cinq au bord. Voyant ses ennemis ainsi occupés, Brun se glissa en rampant dans l'eau; ses atroces douleurs le faisaient hurler; il aimait mieux se noyer que d'être assommé de coups si ignominieux. Il n'avait jamais essayé de nager et il espérait en finir du coup avec la vie. Contre son attente, il se sentit nager et porter sans encombre par le courant. Tous les paysans le virent et s'écrièrent: «Ce sera pour nous une honte éternelle!» Ils étaient désolés et ils s'en prirent aux femmes: «Que ne restiez-vous à la maison! Regardez, il nage, il s'en va.» Ils revinrent dans la cour pour revoir le tronc de chêne et ils y trouvèrent encore la peau et les poils de la tête et des pieds; ils en


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