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Orgueil et préjugés. Jane AustenЧитать онлайн книгу.

Orgueil et préjugés - Jane Austen


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à l’égard de votre sexe pour douter de la possibilité de tout ceci?

      » — Je n’ai jamais vu de femme qui ressemblât au portrait que vous venez de tracer: je ne croyais pas qu’une seule personne pût réunir autant de qualités.“

      Mme Hurst et Mlle Bingley se récrièrent sur l’injustice d’un tel doute et assurèrent qu’elles connaissaient beaucoup de femmes qui répondaient à cette description, lorsque M. Hurst les força au silence en se plaignant amèrement du peu d’attention qu’elles donnaient au jeu. La conversation étant interrompue, Élisabeth quitta le salon.

      „Éliza Bennet, dit alors miss Bingley, est une de ces jeunes personnes qui cherchent à se faire valoir auprès de l’autre sexe, en diminuant le mérite du leur; avec bien des hommes, je crois que cela réussit: mais, selon moi, c’est un moyen pitoyable, un bien pauvre artifice.

      » — Il y a sans doute de la petitesse, reprit M. Darcy, à qui cette remarque était particulièrement adressée, dans toutes les ruses que les dames daignent quelquefois employer pour nous captiver; tout ce qui tient à l’art est méprisable.“

      Mlle Bingley ne fut pas assez satisfaite de cette réponse pour continuer la conversation.

      Élisabeth, peu de temps après, vint leur dire que sa sœur était plus mal. Bingley voulut qu’on envoyât sur-le-champ chercher M. Jones. Ses sœurs, convaincues qu’un médecin de province ne pouvait rien savoir, conseillaient d’en faire venir un de Londres. Enfin, il fut décidé qu’on ferait appeler M. Jones le lendemain matin, si toutefois Mlle Bennet n’était pas beaucoup mieux. Bingley était réellement inquiet; ses sœurs assuraient qu’elles étaient cruellement tourmentées et cherchaient à se distraire en faisant de la musique, tandis que M. Bingley ne put trouver quelque repos qu’après avoir recommandé à sa femme de charge de donner tous ses soins aux deux demoiselles Bennet.

      CHAPITRE IX

      Élisabeth passa presque toute la nuit auprès de sa sœur et eut le plaisir de répondre, sur les informations qu’envoya demander de bonne heure M. Bingley et que vinrent prendre peu après les élégantes femmes-de-chambre de ses sœurs, qu’elle était un peu mieux. Alors Élisabeth écrivit un mot à sa mère pour lui demander de venir juger par elle-même de l’état d’Hélen, et les pria de l’envoyer sur-le-champ à Longbourn. Mme Bennet ne tarda pas à se rendre au désir de sa fille; elle vint à Netherfield, accompagnée de Catherine et de Lydia.

      Si Mme Bennet avait trouvé Hélen dangereusement malade, elle eût été très-affligée; mais, voyant que sa maladie n’aurait pas de suites fâcheuses, elle ne désirait nullement un prompt rétablissement, le retour de la santé devant nécessairement l’éloigner de Netherfield. Elle ne voulut point écouter les instances que lui fit sa fille de la reconduire à Longbourn, et le médecin, qui arriva en cet instant, dit qu’il serait fort imprudent de la déplacer, qu’il fallait au moins attendre que la fièvre fût passée.

      Après être restée quelque temps avec Hélen, et sur l’invitation de Mlle Bingley, Mme Bennet et ses trois filles descendirent au salon. Bingley vint au-devant de Mme Bennet et lui dit qu’il espérait qu’elle n’avait pas trouvé mademoiselle Hélen plus malade qu’elle ne le croyait.

      „En vérité, monsieur, je ne m’attendais pas à la trouver si mal, ce fut sa réponse. M. Jones dit qu’il est impossible de la déplacer maintenant; il faut que nous abusions encore pendant quelque temps de votre bonté.

      » — La déplacer! s’écria Bingley, il n’y faut pas penser. Ma sœur, je suis sûr, ne voudrait pas entendre parler de son déplacement.

      » — Vous pouvez être persuadée, madame, dit très-froidement miss Bingley, que tant que Mlle Bennet demeurera ici, on aura pour elle toutes les attentions possibles.“

      Mme Bennet fut prodigue de remerciemens.

      „Si je ne comptais sur vos bons soins, ajouta-t-elle, je serais vraiment inquiète, car elle est bien, bien malade; elle souffre beaucoup, mais avec une patience d’ange: en vérité, on ne peut désirer un caractère plus aimable que le sien; je dis souvent à mes autres filles qu’elles ne peuvent lui être comparées. Vous avez un fort joli salon, M. Bingley; Netherfield est la maison la plus agréable qu’il y ait dans ces environs, j’espère que vous ne penserez pas à la quitter de sitôt.

      » — Tout ce que je fais est décidé à la hâte, reprit-il; si je dois quitter Netherfield, je serai sans doute parti cinq minutes après en avoir eu l’idée. Cependant, pour le moment, je m’y crois fixé.

      » — Voilà absolument ce que j’eusse pensé de vous, dit Élisabeth.

      » — Vous commencez à me comprendre! s’écria-t-il en se tournant vers elle.

      » — Oh! oui, je vous entends parfaitement bien.

      » — J’aimerais à prendre ceci pour un compliment; mais être sitôt pénétré, cela ne fait-il pas un peu pitié?

      » — C’est selon: je ne prétends pas dire qu’un caractère caché, difficile à connaître, soit plus ou moins estimable que le vôtre.

      » — Lizzy! s’écria sa mère, pensez où vous êtes, n’allez pas vous livrer à toutes ces boutades indiscrètes que l’on vous permet à la maison.

      » — Je ne savais pas, continua M. Bingley, que vous étudiassiez les caractères; cette occupation doit être très-intéressante.

      » — Oui; mais les caractères embrouillés sont les plus amusans, ils ont du moins cet avantage.

      » — La province, dit Darcy, doit généralement fournir peu pour une telle étude, la société y est si rétrécie!

      » — Oui, mais le monde change et donne toujours matière à de nouvelles observations.

      » — Sans doute! s’écria Mme Bennet en entendant ce mot province, on est aussi bien pour cela en province qu’ailleurs.“

      Tout le monde fut surpris; et Darcy, jetant sur elle un regard de mépris, se retira à l’autre bout du salon. Mme Bennet, croyant l’avoir forcé au silence, continua d’un air triomphant:

      „Je ne vois pas que Londres ait tant d’avantages sur la province si ce n’est la quantité de magasins et de places publiques. La campagne est bien plus agréable, n’est-il pas vrai, M. Bingley?

      » — À la campagne, répondit-il, je ne désire pas d’autre séjour, et à Londres, je pense de même; tous les deux ont leurs avantages. Je puis être également heureux dans la capitale ou dans la province.

      » — Ah! oui! c’est que vous avez l’esprit bien tourné; mais monsieur, regardant M. Darcy, semble croire que la campagne n’est rien du tout.

      » — En vérité, maman, vous vous trompez, dit en rougissant Élisabeth, vous avez mal compris M. Darcy; il a seulement voulu dire que la société était bien plus nombreuse à la ville qu’à la campagne: vous savez que cette observation est juste.

      » — Certainement, ma chère, mais, quant au voisinage, il faut en convenir, il y a bien peu de voisinage comme le nôtre; car, enfin, nous avons ici vingt-quatre familles à voir.“

      Il n’y eut que la crainte de blesser Élisabeth qui pût engager M. Bingley à tenir son sérieux. Sa sœur fut moins délicate: elle sourit à M. Darcy d’une manière fort expressive. Élisabeth, voulant détourner la conversation, demanda à sa mère si Charlotte Lucas avait passé la veille à Longbourn.

      „Oui, elle est venue avec son père. Ne trouvez-vous pas sir William fort aimable, M. Bingley? Ses manières sont si distinguées, il a toujours quelque chose de joli à dire: voilà ce que, moi, j’appelle un homme bien élevé; et ceux qui croient montrer leur importance par un air froid et dédaigneux se trompent beaucoup.

      » — Charlotte a-t-elle dîné avec vous?


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