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Le IIme livre des masques. Remy de GourmontЧитать онлайн книгу.

Le IIme livre des masques - Remy de Gourmont


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jadis, en vain.

      Septima post decimam felix et ponere vitem

       Et prensos domitare boves et licia telae

       Addere. Nona fugoe melior, contraria furtis.

       Multa adeo gelida melius se nocte dedere

       Aut cum sole novo terras irrorat Eous.

       Nocte leves melius stipulae, nocte arida prata

       Tondentur: noctis lentus non deficit humor.

      C'est avec la même sécurité, la même maîtrise que M. Jammes nous dit les travaux du mois de mars:

      ......................................................

       Pour les bestiaux les rations d'hiver finissent.

       On ne mène plus, dans les prairies, les génisses

       qui ont de beaux yeux et que leurs mères lèchent,

       mais on leur donnera des nourritures fraîches.

      Les jours croissent d'une heure cinquante minutes.

       Les soirées sont douces et, au crépuscule,

       les chevriers traînards gonflent leurs joues aux flûtes.

       Les chèvres passent devant le bon chien

       qui agite la queue et qui est leur gardien.

      Il n'y a sans doute pas aujourd'hui en France un autre poète capable d'évoquer un tableau aussi clair et aussi vrai avec des mots aussi simples, avec une phrase qui semble celle d'une causerie distraite et qui pourtant, comme par hasard, forme des vers charmants, purs et définitifs. Cependant le poète suit bien sagement son calendrier et, comme Virgile oublie un instant les soins que l'on donne aux abeilles pour nous conter l'aventure d'Aristée, M. Francis Jammes, arrivé à la fête des Rameaux, nous dit en quelques vers une histoire de Jésus belle et tendre ainsi que les vieilles gravures que l'on clouait dans les alcôves.

      .....................................................

       Jésus pleurait dans le jardin des oliviers....

       On était allé, en grande pompe, le chercher....

       A Jérusalem les gens pleuraient en criant son nom....

       Il était doux comme le ciel, et son petit ânon

       trottinait joyeusement sur les palmes jetées.

       Des mendiants amers sanglotaient de joie,

       en le suivant, parce qu'ils avaient la foi....

       De mauvaises femmes devenaient bonnes

       en le voyant passer avec son auréole

       si belle qu'on croyait que c'était le soleil.

       Il avait un sourire et des cheveux en miel.

       Il a ressuscité des morts ... Ils l'ont crucifié...

      Quand nous aurons (et peut-être l'aurons-nous) un calendrier complet écrit dans ce ton de simplicité pathétique, il y aura d'ajouté aux tomes épars qui sont la poésie française un livre inoubliable.

      M. Francis Jammes offrit ses premiers vers au public en 1894. Il devait avoir vingt-cinq ans et sa vie avait été ce qu'elle est restée, solitaire au fond des provinces, vers les Pyrénées, mais non dans la montagne:

      Les villages brillent au soleil dans tes plaines,

       pleins de clochers, de rivières, d'auberges noires....

      Les femmes des paysans «ont la peau en terre brune», mais les matins sont bleus et les soirées sont bleues,

      avec des champs de paille qui sentent la menthe,

       avec des fontaines crues où l'eau claire chante....

      avec des sentiers où quand c'est le mois d'octobre

       le vent fait voler les feuilles des châtaigners....

      ainsi vont les doux villages éparpillés

       sur les coteaux, aux flancs des coteaux, à leurs pieds,

       dans les plaines, dans les vallées, le long des gaves,

       près des routes, près des villes et des montagnes;

       avec les clochers minces au-dessus des toits,

       avec, sur les chemins qui se croisent, des croix,

       avec des troupeaux longs qui ont des cloches rauques

       et le berger fatigué traînant ses sabots....

      avec les palombes aux yeux rouges et tout ronds

       qui arrivent de loin dans le gris des nuages

       et les grues qui grincent dans le froid et qui font,

       comme des serrures rouillées, un bruit sauvage....

      Voilà, tout déchiqueté, vu par bribes, le paysage où évoluèrent les émotions de ce poète dont la solitude a exaspéré et parfois troublé l'originalité. Soucieux d'abord de dire son impression du moment, il se répète volontiers, variant par de faible nuances les détails de la vie qu'il aime. Mais que de visions émues, que de jolies imaginations, et comme les mots viennent doucement écrire des pages dont la fraîcheur fait envie! Ainsi le tableau, de chaste volupté:

      Tu serais nue sur la bruyère humide et rose....

      et cet autre, d'un sentiment plus intime:

      La maison serait pleine de roses et de guêpes....

      et la complainte d'amour et de pitié qui commence ainsi:

      J'aime l'âne si doux

       marchant le long des houx.

      Il prend garde aux abeilles

       et bouge les oreilles;

       et il porte les pauvres

       et des sacs remplis d'orge.

      et (malgré une strophe mauvaise) la discrète élégie que résument ces quatre vers d'une musique si tiède et si lasse:

      Le soleil pur, le nom doux du petit village,

       les belles oies qui sont blanches comme le sel,

       se mêlent à mon amour d'autrefois, pareil

       aux chemins obscurs et longs de Sainte Suzanne.

      Après encore un an ou deux d'une vie sans doute toujours pareille, le poète a pris une conscience plus décisive de lui-même; son émotion devient parfois presque plaintive en même temps que la sensualité de l'homme s'exalte, s'avoue avec moins de pudeur, mais toujours soeur d'un sentiment et alors toujours pure malgré sa franchise et la nudité de ses gestes. Ce triple aspect humain, orgueil, émotion, sensualité, le poème en dialogue, appelé Un Jour, le développe, en couleurs vives et douces: quatre scènes où la poésie vole au-dessus d'une vie monotone et presque triste, quatre images très simples, et même, si l'on veut, naïves, mais d'une naïveté qui se connaît et qui connaît sa beauté. Plus que d'ambitieuses paraphrases c'est bien là la journée (ou la vie) d'un poète, qui perçoit le monde extérieur d'abord comme une sensation brute (ainsi que tout autre homme), puis en dégage aussitôt, en son esprit prompt aux généralisations, la signification symbolique ou absolue. Et tout ce poème est plein de vers admirables et graves, des vers d'un vrai poète dont le génie encore en croissance éclate, tel des rayons de soleil à travers une haie d'acacias:

      C'est la mère douce aux cheveux gris dont tu es né.

      Les gens pauvres et fiers sont pareils à des cygnes.

      Cache-lui ton ennui parce qu'elle est une femme.

       Elle est trop jeune pour pouvoir porter deux âmes.

      Bois les baisers de ta douce et tendre fiancée.

       Les larmes des femmes sont lourdes et salées

       comme la mer qui noie ceux qui y sont allés.

      Ne


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