Эротические рассказы

Vie de Jeanne d'Arc. Vol. 1 de 2. Anatole FranceЧитать онлайн книгу.

Vie de Jeanne d'Arc. Vol. 1 de 2 - Anatole France


Скачать книгу
href="#n341" type="note">341. Ces mendiants distribuaient des médailles de plomb, enseignaient de courtes prières, en manière de recettes, et vouaient une affection spéciale au saint nom de Jésus342.

      Pendant les deux semaines que Jeanne passa dans la ville de Neufchâteau343, elle fit ses dévotions dans le couvent des Cordeliers et se confessa deux ou trois fois aux mendiants344. On a dit qu'elle était du tiers-ordre de Saint-François, et l'on a supposé que son affiliation datait de son séjour à Neufchâteau345.

      C'est fort douteux; et, dans tous les cas, l'affiliation ne dut pas être très solennelle. On ne voit pas qu'en si peu de temps les mendiants aient pu la former aux pratiques de la piété franciscaine. Pour se pénétrer de leur esprit, elle était déjà trop imbue de doctrines ecclésiastiques sur le spirituel et le temporel, trop pleine de mystères et d'apocalypses. D'ailleurs, son séjour à Neufchâteau fut troublé de soucis et coupé d'absences.

      Elle reçut dans cette ville une citation à comparaître devant l'official de Toul dont elle relevait comme native de Domremy-de-Greux. Un jeune garçon de Domremy prétendait qu'il y avait promesse de mariage entre la fille de Jacques d'Arc et lui. Jeanne le niait. Il s'obstina dans son dire et l'assigna devant l'official346. Ce tribunal ecclésiastique retenait les causes comme celle-ci et l'on portait les demandes soit en nullité de mariage, soit en validité de fiançailles.

      Ce qui est étrange dans le cas de Jeanne, c'est que ses parents lui donnèrent tort et prirent le parti du jeune homme. Ce fut malgré leur défense qu'elle soutint son procès et comparut devant l'official. Elle déclara plus tard que, dans cette affaire, elle leur avait désobéi et que c'était son seul manquement à la soumission qu'elle leur devait347.

      Pour aller de Neufchâteau à Toul et revenir, il lui fallait faire plus de vingt lieues à pied sur des chemins infestés par des gens d'armes, dans ce pays mis à feu et à sang et que les paysans de Domremy venaient de fuir épouvantés. C'est pourtant à quoi elle se résolut, contre le gré de ses parents.

      Peut-être se rendit-elle à l'official de Toul non pas une fois, mais deux et trois fois. Et si elle ne chemina pas jour et nuit avec son faux fiancé, ce fut par grand hasard, car il suivait la même route en même temps. Ses Voix lui disaient de ne rien craindre. Devant le juge elle jura de dire la vérité et nia qu'elle eût fait promesse de mariage.

      Elle n'avait point de torts. Mais sa conduite, qui procédait d'une innocence héroïque et singulière, fut mal jugée. On prétendit à Neufchâteau que ces voyages lui avaient mangé tout ce qu'elle avait. Mais qu'avait-elle? hélas! Elle était partie sans rien. Peut-être lui avait-il fallu mendier son pain aux portes. Les saintes reçoivent l'aumône comme elles la donnent: pour l'amour de Dieu. On conta que, pendant l'instance, son fiancé, la voyant vivre en compagnie de mauvaises femmes, s'était désisté de sa demande en justice, renonçant à une promise si mal famée348. Propos calomnieux, qui ne trouvèrent que trop de créance.

      Après deux semaines de séjour à Neufchâteau, Jacques d'Arc avec les siens retourna à Domremy. Le verger, la maison, le moustier, le village, les champs, dans quel état de désolation les revirent-ils! Tout avait été pillé, ravagé, brûlé par les gens de guerre. Les soldats, faute de pouvoir rançonner les vilains disparus, avaient détruit leurs biens. Le moustier, naguère encore fier comme une forteresse, avec sa tour où veillait le guetteur, n'était plus qu'un amas de pierres noircies. Et les habitants de Domremy durent aller, aux jours fériés, entendre la messe à l'église de Greux349.

      Telle était la misère du temps, qu'ordre fut donné aux villageois de se tenir renfermés dans les maisons fortes et les châteaux350.

      Cependant les Anglais assiégeaient la ville d'Orléans, qui appartenait au duc Charles, leur prisonnier. Ce qui n'était point bien fait à eux, car, ayant son corps, ils devaient respecter ses biens351. Ils élevaient des bastilles autour de cette ville d'Orléans, cœur de France, et l'on disait qu'ils s'y tenaient à grande puissance352.

      Et madame sainte Catherine et madame sainte Marguerite, qui étaient des personnes très attachées à la terre des Lis, les féales du dauphin Charles et ses belles cousines, s'entretenaient avec la bergère des malheurs du royaume et lui disaient sans cesse:

      – Il faut que tu quittes ton village et que tu ailles en France353.

      Jeanne était d'autant plus impatiente de partir qu'elle avait annoncé elle-même le temps de son arrivée en France et que ce temps approchait. Elle avait dit au capitaine de Vaucouleurs que le dauphin aurait secours avant la mi-carême. Elle ne voulait pas faire mentir ses Voix354.

      L'occasion, qu'elle épiait, de retourner à Burey, se présenta vers la mi-janvier. À cette époque, la femme de Durand Lassois, Jeanne le Vauseul, faisait ses couches355. À la campagne, l'usage voulait que les jeunes parentes et les amies de l'accouchée se rendissent auprès d'elle pour soigner la mère et l'enfant. Coutume honnête et cordiale qu'on suivait d'autant mieux qu'on y trouvait une occasion de bonnes rencontres et de joyeux caquets356. Jeanne pressa son oncle de la demander à son père pour soigner l'accouchée et Lassois consentit: il faisait tout ce que voulait sa nièce, et, peut-être, était-il encouragé dans sa complaisance par des personnes pieuses et de considération357. Mais que ce père, qui tantôt ne parlait de rien moins que de noyer sa fille pour l'empêcher de partir avec les gens d'armes, la laissât aller aux portes de la ville, sous la garde d'un parent dont il connaissait la faiblesse, c'est ce qu'on a peine à comprendre. Il le fit pourtant358.

      Ayant quitté la maison de son enfance, qu'elle ne devait plus revoir, Jeanne, en compagnie de Durand Lassois, descendit la vallée natale, dépouillée par l'hiver. En passant devant la maison du laboureur Gérard Guillemette de Greux, dont les enfants étaient en grande amitié avec ceux de Jacques d'Arc, elle cria:

      – Adieu! Je vais à Vaucouleurs359.

      Quelques pas plus loin, elle aperçut sa compagne Mengette:

      – Adieu, Mengette, dit-elle; je te recommande à Dieu360.

      Et sur le chemin, au seuil des maisons, rencontrant des visages connus, à tous elle disait adieu361. Mais elle évita de voir Hauviette, avec qui elle avait joué et dormi, aux jours d'enfance, et qu'elle aimait chèrement. Elle craignit, si elle lui disait adieu, de sentir son cœur défaillir. Hauviette ne sut que plus tard le départ de son amie et elle en pleura très fort362.

      Venue pour la seconde fois à Vaucouleurs, Jeanne croyait bien mettre le pied dans une ville appartenant au dauphin, et entrer, comme on disait alors, en chambre royale363. Elle se trompait. Depuis les premiers jours du mois d'août 1428, le capitaine de Vaucouleurs avait rendu la place au seigneur Antoine de Vergy, mais il ne l'avait pas encore livrée. C'était une de ces capitulations à terme comme on en signait beaucoup à cette époque et qui, le plus souvent, cessaient d'être exécutoires au cas où la place recevait secours avant le jour fixé pour la reddition364.

      Comme elle avait fait neuf mois auparavant, Jeanne alla trouver sire Robert au château, et voici la révélation qu'elle


Скачать книгу

<p>342</p>

Wadding, Annales Minorum, V, p. 183.

<p>343</p>

Jean Morel déclare qu'elle fut quatre jours à Neufchâteau, et il ajoute: «Ce que je vous dis, je le sais, car je fus avec les autres à Neufchâteau» (Procès, t. II, p. 392); Gérard Guillemette parle de quatre ou cinq jours (Procès, t. II, p. 414); Nicolas Bailly de trois ou quatre (Procès, t. II, p. 451). Mais Jeanne dit aux juges de Rouen qu'elle était restée quinze jours à Neufchâteau (Procès, t. I, p. 51); elle avait un souvenir moins lointain et sans doute plus fidèle.

<p>344</p>

Procès, t. I, p. 51.

<p>345</p>

S. Luce, Jeanne d'Arc à Domremy, ch. IX, X, XI. – Abbé V. Mourot, Jeanne d'Arc et le tiers-ordre de Saint-François, Saint-Dié, 1886, in-8o. – L. de Kerval, Jeanne d'Arc et les Franciscains, Vanves, 1893, in-18. —E iera begina, dit une correspondance de Morosini, éd. Lefévre-Pontalis, t. III, p. 92 et note 2.

<p>346</p>

Procès, t. II, p. 476. – E. Misset, Jeanne d'Arc Champenoise, 1895, in-8o, p. 28.

<p>347</p>

Ibid., t. I, p. 128.

<p>348</p>

Procès, t. I, p. 215. – L'article 9 de l'acte d'accusation est constitué d'après une enquête faite à Neufchâteau.

<p>349</p>

Procès, t. II, p. 396 et passim.

<p>350</p>

S. Luce, Jeanne d'Arc à Domremy, pp. CLXXX et 230.

<p>351</p>

Mistère du siège, V. 497.

<p>352</p>

Chronique de la Pucelle, ch. XXXIV et XXXV. – Jean Chartier, Chronique, ch. XXXII, XXXV. —Journal du siège, pp. 2 et suiv.

<p>353</p>

Procès, t. I, p. 52, 216.

<p>354</p>

Procès, t. II, p. 456.

<p>355</p>

Ibid., t. II, pp. 428, 434. – S. Luce, Jeanne d'Arc à Domremy, p. CLXXX. – G. de Braux et E. de Bouteiller, Nouvelles recherches, p. XXIII.

<p>356</p>

Les caquets de l'accouchée, nouv. éd. par E. Fournier et Le Roux de Lincy, Paris, 1855, in-16, introduction.

<p>357</p>

Procès, t. I, p. 53; t. II, p. 443 et passim.

<p>358</p>

Procès, t. II, pp. 428, 430, 431.

<p>359</p>

Ibid., t. II, p. 416.

<p>360</p>

Ibid., t. II, p. 431.

<p>361</p>

Ibid., t. II, p. 416.

<p>362</p>

Ibid., t. II, p. 419.

<p>363</p>

Procès, t. II, p. 436.

<p>364</p>

S. Luce, Jeanne d'Arc à Domremy, pp. CLXVIII et 222, 234.

Яндекс.Метрика